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un acte de renonciation à la communauté, pour s'en tenir à ses reprises; et, le 18 juin suivant, la liquidation de ses reprises avait eu lieu devant Me Delapalme, notaire à Verailles : elle s'était fait représenter dans cet acte par un autre mandataire, nommé Julien.

A cette époque la demoiselle Faucon était enceinte pour la seconde fois; elle touchait même au terme de sa grossesse ; cependant elle avait constamment dissimulé son état, et elle avait toujours fait défaut aux actes auxquels sa présence importait le plus. On remarque même que, dans le dernier de ces actes, celui qui liquidait ses reprises, loin d'y faire des réserves naturelles en faveur de l'enfant qu'elle allait mettre au jour, s'il eût été le légitime fruit de son mariage, le mandataire de la demoiselle Faucon va jusqu'à déclarer en son nom qu'aucun enfant n'est issu du mariage des sieur et dame Monniot,

Cependant, le 11 juillet 1816, deux ans et trois mois après sa sortie du domicile conjugal, la dame Monniot accoucha à Paris, nou dans sa demeure habituelle, mais chez une sagefemme, rue Dauphine, u° 36, la même chez laquelle eile avait fait ses premières couches. Cette fois elle donna le jour à un enfant mâle vivant, qui ne tarda pas à devenir pour les anciens époux le sujet des plus scandaleux débats.

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Présenté à la mairie du 11 arrondissement le 13 du même mois, par la sage-femme Viorbe, il y fut inscrit sous les prénoms de Louis-Gustave. On le déclara fils de Claude-Joseph Monniot, employé, absent (sans indication de demeure), et de Louise-Camille Faucon. L'un des témoins était ce même Aubert qui avait figuré comme mandataire de la demoiselle Faucon dans l'acte de renonciation. Cette qualification d'employé donnée au sieur Monniot avait évidemment le même but que le fait, de la part de la demoiselle Faucon, d'aller faire ses couches hors de sa demeure habituelle, chez une sage-femme c'était de soustraire à la connaissance et aux investigations de Monniot la naissance de cet enfant. D'autres faits non équivoques révélaient la même intention. 1o Le premier enfant mort-né, bien que le fruit des désordres de la demoiselle Faucon, avait été inscrit sur les registres de l'état civil comme fils du sieur Monniot, commis greffier, dont la demeure était exactement rapportée. 2o Le sieur

Aubert, l'un des témoins, avait été le mandataire de la demoiselle Faucon dans l'acte de renonciation fait à Versailles; il connaissait parfaitement et la profession et la demeure de Monuiot. 3o L'acte de baptême de Louis-Gustave sur le registré de la paroisse portait, à côté du nom de Monniot, déclaré père de l'enfant, l'énonciation précise de commis greffier à Versailles; on avait ajouté absent pour affaires.De tout cela résultait clairement la volonté d'éviter jusqu'aux soupçons du sieur Monniot.

Ces précautions avaient eu un plein succès. Déjà le jeune Louis-Gustave avait atteint sept ans et dix mois, sans que le fait mystérieux de sa naissance eût été révélé à Monniot. Ce fut une démarche inconsidérée de la demoiselle Faucon, qui vint l'en instruire. Celle-ci, réduite aux plus affreusés extrémités, crut pouvoir s'adresser à son ancien époux. Elle lui écrivit une lettre le 17 mai 1824, pour lui demander des secours; mais elle se borna à lui exposer ses besoins, et ne lui parla aucunement de Louis-Gustave. Le sieur Monniot, muni d'informations certaines qu'il venait de se procurer sur l'existence de cet enfant, crut voir dans le silence même que gardait la mère sur son compte un aveu tacite de son illégitimité. En conséquence, pour toute réponse à la lettre qu'il avait reçue d'elle, il forme, tant contre Louis-Gustave et le sieur Biguet, son tuteur ad hoc, que contre la demoiselle Faucon, sa tutrice légale, une action en désaveu de paternité, fondée, aux termes de l'art. 313 du code civil, sur l'adultère et le recel de la naissance.

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Dans cet état, la cause ayant été contradictoirement plaidée, jugement du tribunal civil de la Seine, du 8 janvier 1816. ainsi conçu: « Le tribunal......., sur la fin de non recevoir résultant de ce que Donniot ne rapportait pas la preuve préalable et juridique de l'adultère de la demoiselle Faucon, sa femme divorcée; Attendu les mots que cause pour dultère, employés dans l'art. 313 du code civil, rapprochés de la première phrase du même article qui les précède immédiatement, et où il n'est question que d'une simple allégation d'impuissance naturelle, ne sauraient également s'entendre que d'un adultère simplement allégué; que ces mêmes mots, pour cause d'adultère, n'ont pas d'autre sens légal, notamment dans les art. 229 et 230 du cod. civ.; que, si, dans

art. 313, le législateur eût voulu subordonner l'action en ésaveu qu'il accorde, au cas de l'adultère de la femme juidiquement et préalablement établi, il eût exprimé formelement son intention; qu'au contraire, les mots auquel cas, u singulier, qu'on lit dans la suite de l'art. 315, énoncent lairement que la seule condition préalable qui soit exigée st celle de la naissance cachée; qu'il est inutile, en effet, l'exiger la preuve préalable de l'adultère, puisque la preuve le non-paternité, qui doit être faite, aux termes du même art. 313, emporte avec elle, et par une conséquence nécessaire, la preuve de l'adultère de la femme;

« Sur le fond, attendu qu'il est dès à présent constant que, pendant le temps qui a couru depuis le trois-centième jusqu'au cent-quatre-vingtième jour avant la naissance de LouisGustave, la femme Monniot a demeuré à Paris, rue Dauphine, no 47, tandis que Monniot a habité Versailles; que tous les. actes signifiés pendant la procédure de divorce à la dame Monniot lui ont été signifiés en sa demeure à Paris, rue Dauphine, no 47, en parlant à sa personne; que la correspondance de la femme Monniot, par laquelle elle s'était rendue coupable envers son mari des injures les plus graves, est antérieure d'une année environ au 13 septembre 1815, correspondant au trois-centième jour avant la naissance de LouisGustave; qu'à la date du 13 octobre suivant, correspondant au deux-cent-soixante-dixième jour avant ladite naissance, Monniot faisait procéder à l'enquête qu'il avait été autorisé à faire pour justifier sa demande en divorce; que, si cette enquête n'a pas été considérée par le tribunal de Versailles comme prouvant suffisamment l'adultère de la femme Monniot, il y a vu la preuve d'une conduite licencieuse et désordonnée, suffisante pour le déterminer à prononcer contre elle le divorce pour cause d'injures graves; que la femme Monniot non seulement ne justifie pas qu'il y ait eu rapprochement entre elle et son mari à l'époque présumée de la conception de Louis-Gustave, mais qu'elle n'articule pas même d'une manière précise ce rapprochement; --Attendu que ces faits sont de nature à justifier et l'adultère de la femme Monniot, et que Monniot n'est pas le père de Louis-Gustave; -Par tous ces motifs, sans s'arrêter ni avoir égard aux fins. de non recevoir proposées par la demoiselle Faucon, femme

divorcée Monniot, et par Biguet, ès noms, dont ils sont dé boutés, donne acte à Monniot du désaveu par lui fait le 1 juillet 1824; admet ledit désaveu, etc. »

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Appel du tuteur et de la tutrice au nom de Louis-Gustave. L première partie du système des appelants tendait à établir, com me fin de non recevoir, la nécessité, pour fonder la demand en désaveu de paternité pour cause d'adultère, de rapporte la preuve préalable et juridique de l'adultère. La preuv du recel de la naissance, disaient-ils, pourrait peut-êtr résulter des circonstances qui motivaient le désaveu; mais en était autrement du fait grave de l'adultère : la loi ne s contentait pas d'une allégation nue sur ce point; il fallait ar river devant la justice armé de preuves juridiquement ac quises de ce fait capital; on s'assurait ensuite, du recel et de tous les autres faits propres à justifier que le mari n'était pas le père de l'enfant. Tels étaient les termes, le vœu précis d l'art. 315; l'ordre même de ses dispositions indiquait cett interprétation. Un arrêt de la cour de cassation du 8 juil let 1812 (1) paraissait, il est vrai, s'être écarté de cette doc trine; mais cet arrêt, le seul que l'on pût citer dans ce sens ne saurait former jurisprudence. Il était à remarquer. d'ailleurs, qu'il avait été rendu contre les conclusions du pro cureur-général Merlin (Répertoire de jurisprudence; 7a vol.. au mot Légitimité, page 242, note), qu'il était en opposition formelle avec les discours des orateurs du gouvernement et des divers rapporteurs de la loi ; qu'en un mot, les jurisconsultes et les professeurs les plus estimés (Toullier, Duranton) persistaient à repousser la doctrine qu'il avait consacrée. —Au reste, dans l'application particulière de l'art. 313 à la cause, il fallait ne pas perdre de vue que non seulement l'adultère prétendu de la demoiselle Faucon n'était pas juridi quement prouvé, mais que même le divorce du sieur Monniot et de la demoiselle Faucon avait été prononcé nommément pour cause d'injurés graves, et non pour cause d'adul tère, bien que ce dernier fait eût été allégué par Monniot La preuve, à cet égard, ayant été jugée insuffisante, on était tenu à ce qui paraissait certain, les injures graves. — Le défenseur des appelants allait même jusqu'à soutenir qu'il

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(1) Voy. auc. coll., tome 1 de 1813, page 11.

y avait chose jugée sur le fait de l'adultère; qu'il impliquerait contradiction, et violation formelle de l'art. 1551 du cod. civ., que le tribunal de la Seine, jugeant les mêmes faits, entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, prononçât que l'adultère était constant, tandis que le tribunal de Versailles avait prononcé, en novembre 1815, qu'il ne l'était

pas.

Au fond, le jugement admettait le système des impossibilités morales de cohabitation, pour refuser à Louis-Gustave le titre d'enfant légitime. - Mais ce système dangereux, qui ouvre une si large porte à l'arbitraire en matière de question d'état, du moins ne devait-il être admis qu'avec une extrême circonspection. — On voulait obliger la dame Monniot à prouver qu'à l'époque présumée de la conception, des rapprochements entre elle et son mari avaient eu lieu, ou que du moins il y avait eu réconciliation entre eux; on argumentait enfin de divers faits d'où paraîtraient résulter une inimitié telle qu'elle les aurait constamment tenus séparés; mais asseoir des condamnations sur de simples conjectures, c'était aller ouvertement contre l'esprit de la loi. — Les rapprochements n'avaient pas été impossibles; la distance de Paris à Versailles repoussait cette supposition. L'inimitié des époux n'était pas une preuve décisive de la non-paternité; elle n'était souvent qu'apparente, et la loi voulait autre chose que des apparences dans une matière aussi grave. Enfin, ce n'était pas à la demoiselle Faucon à prouver qu'il y avait eu réconciliation : c'était au mari, qui prétendait qu'il n'y en avait jamais eu, à prouver son exception.

L'intimé produisait pour sa défense la plupart des moyens développés par le ministère public (1).

L'art. 313, disait M. l'avocat-général, n'exige pas la preuve juridique et préalable de l'adultère. La seule condition qu'il impose est d'établir le recel de la naissance : cette condition remplie, l'action en désaveu est ouverte au mari. Voilà tout

(1) Il présentait aussi plusieurs moyens de droit que Pon peut retrou ver, quant à la fin de non recevoir, à l'espèce Lhoste, G. le mineur Lhoste, rapportée dans ce Journal (tome 1o de 1827, page 61); et quant au fond, à l'espèce Bucheron, C. Bugnot, rapportée dans ce Journal (tome 3 de 1826, page 168).

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