pas nul, et tant qu'il n'est pas attaqué par les créanciers, il reste parfait; il passe avec toute sa perfection et se consolide dans les mains des tiers. Cette doctrine est conforme à la jurisprudence consacrée par deux arrêts de la cour de cassation, l'un du 18 décembre 1810, et l'autre du 25 décembre 1815 (1). Il faut donc conclure que la bonne foi des tiers les met à l'abri de toute recherche lors même qu'ils sont porteurs d'un acte révocable pour cause de fraude: d'où la conséquence nécessaire que, dans l'espèce, la mauvaise foi des sieurs Saint-Clair et Duffé n'ayant pas été prouvée, la cour royale de Pau a fait une fausse application de l'art. 1167 en prononçant contre eux la nullité de l'acte du 24 août 1816, et, par suite, celle de leur acte de cession. Il résulte des faits de la cause, répondait-on pour les sieurs Griet et Courtade, que les lettres de change dont ils sont porteurs remontent à une date antérieure à celle de l'acte du 24 août 1816: dès lors, il n'est pas vrai de dire qu'ils n'étaient pas créanciers de Sarrat à l'époque où cet acte a été consenti, et qu'ils auraient dû être déclarés par ce motif non receyables dans leur action. Les demandeurs sont tout aussi mal fondés à soutenir que l'art. 1167 du cod. civ. a été mal interprété à leur égard, et qu'il leur en a été fait une fausse application, par la raison qu'il n'aurait pas été jugé qu'ils eussent connu la fraude qui viciait le titre à cux cédé par Calaman. Cette assertion de leur part est suffisamment démentie par les motifs du jugement du tribunal de Florac, qui ont été adoptés dans leur entier par l'arrêt attaqué, et qui admettent comme un fait constant non seulement l'intelligence entre Calaman et Sarrat pour frustrer les créanciers de ce dernier, mais encore celle qui exista entre les sieurs Saint-Clair, Duffé et Calaman, à l'époque de l'acte de cession du 15 février 1817, dans la vue de consolider la fraude pratiquée au préjudice de ces créan ciers. A ces réponses en fait les défendeurs ajoutaient, en droit, 1o qu'en accordant aux créanciers le droit d'attaquer les actes tome (1) Voy. ce recueil, 1er sem. de 1811, page 417; nouv. édit., 11, page 1010, et le Bulletin des Arrêts de la cour de cassation, 1822, n° 158. passés par leur débiteur en fraude de leurs droits, l'art. 1167 n'avait fait que poser un principe duquel il résultait l'obligation aux juges de rechercher et de certifier la fraude, mais qu'il leur abandonnait le choix des moyens propres à la constater et à former leur conviction; que, s'ils se trompaient, leur erreur ne constituait qu'un mal-jugé, à l'abri du recours en cassation, et qu'on ne pouvait en induire ni une fausse application ni une fausse interprétation du susdit article; que c'était mal raisonner que de prétendre, sous prétexte que cet article ne détermine pas les caractères auxquels on peut reconnaître un acte frauduleux, qu'on doive aller les rechercher dans les lois romaines ; que, si ces lois peuvent être consultées comme raison écrite dans les cas sur lesquels notre législation est restée muette, il n'est pas permis d'y avoir recours pour expliquer un texte précis de notre droit, contenaut un principe clairement posé, et dont les conséquences sont placées dans le domaine de la conscience du juge; qu'au surplus les lois romaines, comme l'art. 1167, réduisaient la question au fait de la connaissance ou de la méconnaissance du vice de l'acte, c'est-à-dire à un point de fait à vérifier; 2o que les textes de ces lois, invoqués par les demandeurs, n'étaient relatifs qu'aux aliénations d'immeubles, et non aux transports des créances, aux quels elles ne s'appliquent évidemment pas, puisque le motif du refus de l'action révocatoire qu'elles dénient contre le tiers est fondé sur la possession de la chose contestée par celui qui la détient de bonne foi, ce qui ne peut avoir lieu à l'égard du cessionnaire d'une créance, qui n'est qu'une chose incorporelle, non susceptible d'une détention réelle; - Qu'en supposant même que l'on dût puiser dans ces lois les raisons de décider dans ce cas, on y trouverait encore, suivant Pothier, en ses Pandectes, des motifs suffisants de repousser les prétentions des demandeurs dans l'obligation qui leur était imposée par elles de s'assurer que la créance cédée n'était point entachée de fraude, et dont ils ne pouvaient s'affranchir sans se rendre participants de la fraude: In fraudem, dit cet auteur, facere videtur etiam qui non facit quod debet facere, intelligendum est; - Enfin, que ces mêmes lois n'admettaient pas toujours la bonne foi du possesseur et son ignorance de la fraude comme un motif de le préférer à celui au préju dice duquel elle avait été pratiquée, ainsi que cela se trouve formellement exprimé dans la loi 10, au titre déjà cité, que in fraudem creditorum, où on lit: Ait prætor........ interdum, causa cognita, etiam si scientia (fraudis) non sit in factum, · actionem permittam;-Que ce second édit formait le complé ment de la législation en cette matière; que législateur romain y eut en vue d'assurer de plus en plus la répression de la fraude, en donnant au juge tous les moyens de la rechercher, de la connaître, et d'empêcher que son auteur pût en profiter par des moyens détournés et par l'intervention d'un tiers; qu'il résultait évidemment de ce dernier texte qu'il avait abandonné aux lumières des juges l'appréciation des circonstances dans lesquelles ils croiraient devoir révoquer les actes prejudiciables aux créanciers, causa cognita, encore bien tiers au profit de qui ces actes auraient été consentis n'eût eu connaissance de la fraude, etiam si scientia non sit. D'où il faudrait conclure encore que, même d'après la loi romaine, la cour d'appel de Pau aurait bien jugé, et que son arrêt serait à l'abri de toute critique. que le t pas Ce système de défense fut combattu avec force par M. l'avocat-général, qui abonda dans le sens des demandeurs en cassation; et il intervint un premier arrêt, qui déclara qu'il y avait partage. Le 12 mars 1827, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Vergès rapporteur, MM. Jacquemin et Jousselin avocats, par lequel: . LA COUR, avocat-général; Sur les conclusions contraires de M. de Vatimesnil, Attendu, sur le premier moyen, qu'il manque en point de fait, puisqu'il est reconnu au procès que les défendeurs étaient créanciers légitimes de Sarrat, en vertu de deux lettres de change, antérieurement au contrat du 25 août 1816; Attendu, sur le second moyen, que les motifs sur lesquels le tribunal de première instance s'est fondé pour déclarer l'acte du 24 août 1816 non sincère et simulé portent non seulement sur des faits relatifs à Sarrat et Calaman, mais encore sur des faits concernant les sieurs Saint-Clair et Buffé; Que ces motifs ont été adoptés par la cour royale de Pau, d'après une nouvelle appréciation des faits déjà reconnus par les premiers juges; - Que par conséquent cette cour n'a violé aucune loi en annulant, d'après tous ces faits, le contrat du 24 août 1816, et par suite le cession du 3 février 1817; Que dès lors il est inutile de s'occuper du surplus des motifs en droit contenus dans l'arrêt attaqué relativement à ladite cession; Vidant le partage déclaré à l'audience du 18 juillet 1826, ReJETTE, etc. » J. L. C. COUR DE CASSATION. Lorsque, sur une demande en complainte, le défendeur allègue qu'il a la possession annale de couper des litières, de fagoter et de faire paître sur le terrain en litige, méme que ses auteurs ont cultivé ce terrain pendant nombre d'années sans trouble ni opposition, le tribunal qui juge qu'en fait, le demandeur ne justifiant pas suffisamment de sa possession annale, il y a lieu à admettre le défendeur à la preuve de ses faits de possession, contrevientils aux dispositions de l'art. 691 du cod. civ., d'après lequel les servitudes discontinues ne peuvent s'établir que par titres? (Rés. nég.) BABIN DE LIGNAC, C. GRANDPRÉ ET AUTRES. Les sieurs Grandpré et autres étaient dans l'usage de faire paitre leurs bestiaux, de couper de la bruyère et de fagoter des épines dans un terrain dit Dufour, dépendant des brandes de Saint-Martin-de-Lignac (Indre). Les sieurs Babin de Lignac, se disaut propriétaires de ces brandes, et par conséquent du terrain dont il s'agit, dirigent un action en complainte contre Grandpré et autres, pour trouble apporté à leur possession. Ceux-ci répondent que, de temps immémorial, ils font tous les actes dont il vient d'être parlé, sur le terrain; que même leurs auteurs l'ont cultivé pendant nombre d'années. Le 6 juin 1823, jugement du juge de paix du Blanc, qui, «considérant que la possession des défendeurs n'est appuyée d'aucun titre; que la preuve n'en peut être admise, aux termes de l'art. 691; que cette possession ne serait que précaire et de pure tolérance, puisqu'elle se rattache à à une servitude discontinue; maintient les demandeurs en possession. » Appel; et, le 27 janvier 1824, jugement du tribunal de première instance du même licu, qui ordonne la preuve par les motifs suivants : « Attendu que la dénégation des actes de possession et la représentation de titres de la part de Babin ne sont pas suffisants pour faire prononcer en leur . faveur une possession, ce qui présente un cumul de possessio et de pétitoire; -Que rien, ni dans l'action des parties, dans leurs dires, ne présente aucune réclamation de servi tude qui puisse attirer l'application de l'art. 691 du cod. eiv. ne s'agissant que de connaître auquel des contestants la pos session annale est acquise, etc. » Pourvoi en cassation de la part des sieurs Babin de Lignac pour violation des art. 2229, 2232, 688, 690 et 691 du cod civ. Le 21 février 1827, ARRÊT de la section des requêtes, M Henrion président, M. Dunoyer rapporteur, M. Guichard père avocat, par lequel • LA COUR, Sur les conclusions de M. Lebeau, avocat-général. -Attendu que la demande introductive formée par les sieurs Babin de Lignac avait pour objet une demande en complainte possessoire relative à un terrain de brandes appelé de Saint-Martin de-Lignac, situ en la commune de Lignac, dans la jouissance duquel ils prétendaien avoir été troublés par leurs adversaires; Que ceux-ci alléguaient, de leur côté, qu'ils avaient la possession annale, ancienne et exclusive de couper litières, fagotage, et faire paître; que même il y avait eu, de lɛ part de leurs auteurs, culture suivie pendant nombre d'années dan la partie de brandes appelée Dufour, sans trouble ni opposition; Que l'art. 691 du cod. civ., concernant les servitudes continues et dis continues, apparentes et non apparentes, est tout-à-fait étranger et in applicable à l'état de la contestation, ainsi réduite à ses véritables termes, et qu'en admettant les parties à la preuve respective de leur faits de possession, telle qu'elle est précisée dans le jugement attaqué. le tribunal du Blanc n'a fait que se conformer aux principes qui rẻ gissent spécialement la matière des complaintes possessoires; JETTE, etc. a A. M. C. RE COUR DE CASSATION. Il n'est dû aucun droit de mutation, de la part de l'héritier ou légataire universel, à raison d'une rente sur l'état qu'il recueille dans la succession de son auteur; mais lorsque le capital de cette rente est employé à l'acquittement de legs particuliers de sommes d'argent, le droit de mutation est-il dú par les légataires particuliers? (Rés. nég.) Dans ce cas, les légataires particuliers sont-ils libérés par |