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Nous trouvons l'abdomen irrégulièrement distendu, les flancs font une saillie très-marquée au-dessous des dernières côtes; l'abdomen, mesuré en passant par l'ombilic, donne 89 centimètres.

Dans la portion droite de l'abdomen, nous limitons assez facilement une assez grosse poche, au niveau de laquelle existe une fluctuation évidente; dans tous les autres points on sent une masse résistante et assez inégale.

L'absence de symptômes de péritonite depuis le début de la maladie, le frottement péritonéal très-léger que nous percevions dans presque tout l'abdomen, nous firent espérer qu'il n'existait pas d'adhérences. Bien entendu que nous avions cependant sur ce point établi nos réserves.

Il fut décidé que l'opération serait pratiquée le mercredi 19 juillet. Un moment M. Frémy et moi nous agitâmes la question de l'opportunité de l'opération faite dans l'hôpital même. L'idée de l'opération pratiquée dans l'intérieur de l'hôpital n'effrayait pas M. Frémy; pour mon compte, j'hésitais à placer mon opérée dans un milieu relativement peu favorable, et j'eus peu de peine à ramener M. Frémy à ma manière de voir, lorsque je lui appris que je pouvais placer notre malade dans un lieu fort salubre. M. Emile Duval avait bien voulu mettre à ma disposition, dans la maison de santé qu'il dirige, deux pièces isolées, et où l'air pouvait être incessamment renouvelé. Le quartier de la barrière de l'Etoile, où la malade a été opérée, me paraissait placé dans les conditions hygiéniques les plus favorables que l'on pût souhaiter.

Le mercredi 19 juillet, à onze heures du matin, la malade étant soumise à l'anesthésie par mon ami le docteur P. Tillaux, je procédai à l'opération, en présence et avec le concours de M. le docteur Frémy, médecin de l'hôpital Beaujon, de mon maître, M. le professeur Gosselin, de mes collègues des hôpitaux, MM. les docteurs Gombault et de Saint-Germain, de MM. les docteurs Denis, Dumont (de Caen), Duval, Lanquetin, Benoît. MM. Spiess et Th. Anger, internes de l'hôpital Beaujon, m'ont assisté, non-seulement pendant l'opération, mais pendant plus de douze jours et de douze nuits, ils ont soigné avec la plus grande sollicitude mon opérée, et c'est à leur zèle et à leur bonne amitié que je rapporte, en grande partie, le succès que j'ai été assez heureux d'obtenir à la suite de ma première ovariotomie.

Lorsque la malade fut complétement endormie, je pratiquai une incision d'environ 15 centimètres, commençant à plusieurs centimètres au-dessous de l'ombilic, et s'étendant jusqu'au pubis. Deux

aides appliquaient avec soin leurs mains sur les parties latérales du ventre pour faire saillir la tumeur, et la fixer exactement contre la paroi abdominale. L'incision terminée, avant d'attaquer directement le kyste, je plaçai huit à dix ligatures sur des vaisseaux de la paroi abdominale, qui donnaient lieu à un écoulemeut notable de sang. Ma main, introduite dans le ventre, entre le kyste et la paroi abdominale, me permit de constater l'absence d'adhérences. Je pratiquai alors une première ponction avec le gros trocart de M. Mathieu; mais, malgré une modification assez heureuse qu'a subie cet instrument, je ne pus faire écouler qu'une très-petite quantité d'un liquide épais, visqueux, blanc jaunâtre; trois nouvelles ponctions pratiquées dans des points différents ne me donnèrent pas un résultat plus heureux. C'est alors que, sur le conseil de M. le docteur Frémy, j'introduisis de nouveau ma main droite dans le ventre, je la plaçai à la partie postérieure du kyste, de manière à pouvoir appliquer celui-ci très-exactement contre la paroi abdominale, lorsque l'expulsion d'une portion du liquide en aurait diminué le volume. Je priai alors M. Gosselin de fendre largement le kyste avec un bistouri; plusieurs incisions furent pratiquées très-rapidement, et il s'écoula alors des flots de matière épaisse, gélatiniforme. En un instant le kyste fut tiré hors de l'abdomen; son pédicule était assez long, et large d'environ 4 centimètres. J'appliquai immédiatement le clamp qui a été construit par M. Mathieu, et lorsque la vis de l'instrument fut fortement serrée, je coupai le kyste au ras de l'in

strument.

Le kyste enlevé, nous avons trouvé la masse intestinale aplatie, appliquée exactement au-devant de la colonne vertébrale, et nous avons procédé immédiatement à la toilette du péritoine. A l'aide d'éponges fines et neuves, nous avons un grand nombre de fois étanché le sang qui s'était accumulé, d'ailleurs en assez petite quantité, dans les cul-de-sac vésico-utérin et recto-utérin. Nous avons mis le soin le plus minutieux à nettoyer la cavité péritonéale, et pendant cette manœuvre un peu longue, nous avons vu l'intestin exposé à l'air se dilater peu à peu, et prendre assez rapidement une teinte rouge assez prononcée.

Nous procédâmes alors à la suture de la paroi abdominale; treize points de suture à anse métallique furent appliqués de la façon suivante: l'aiguille de Simpson piquant la peau du côté droit était conduite de dehors en dedans, de façon à traverser le péritoine à 2 centimètres environ de la surface de section de la paroi abdominale; puis, introduite alors de dedans en dehors, elle perforait le côté

gauche de la paroi au même niveau. De cette façon, nous pouvions adosser les surfaces séreuses correspondantes dans une étendue de 2 centimètres. Deux des points de suture furent mis au-dessous du pédicule et onze au-dessus; les deux fils voisins du pédicule furent placés très-près de celui-ci, de manière que la surface séreuse qui entourait ce débris du kyste fût en contact très-immédiat avec la séreuse de la paroi du ventre.

Tous les fils furent placés avant qu'un seul d'eux fût fixé définitivement, et c'est là un point sur lequel j'insiste. En effet, lorsque l'on comprend le péritoine dans la suture, l'aiguille, si fine qu'elle soit, déchire quelques petits vaisseaux de la séreuse, et donne lieu parfois à un écoulement de sang assez abondant. Dans le cas actuel, j'eus soin d'éponger de nouveau la cavité péritonéale, avant de fixer définitivement les sutures, et je pus ainsi retirer plus de 100 grammes de sang à l'état presque liquide ou sous forme de caillots. J'enlevai évidemment ainsi un corps étranger qui, laissé dans le ventre, ne pouvait jouer qu'un rôle fort nuisible. Les deux côtés de la paroi abdominale étant alors rapprochés bien exactement, chacun des fils métalliques fut tordu, puis coupé très-près de la plaie.

L'opération terminée, la malade fut soigneusement nettoyée et portée sur son lit: les diverses manoeuvres avaient duré près de sept quarts d'heure, et pendant tout ce temps la patiente avait été soumise à une anesthésie complète.

L'opérée présente un aspect assez satisfaisant. Les draps ont été chauffés avec soin, et les membres de la malade sont entourés de boule remplies d'eau chaude. La malade avale quelques cuillerées de vin sucré aussitôt après l'opération. Dans la journée on lui en offre plusieurs fois, elle en prend en petite quantité, mais chaque fois elle a quelques légères envies de vomir.

La température est assez élevée, je ne juge pas convenable de faire allumer du feu dans la pièce où se trouve la malade.

La malade se réchauffe assez difficilement pendant les premières heures qui suivent l'opération, ce n'est que vers cinq heures (quatre heures après l'opération) qu'une réaction assez franche se développe. Pendant l'après-midi, il y avait eu à plusieurs reprises une tendance marquée à la syncope. La malade se plaint de souffrir dans le ventre. On lui administre un lavement avec 10 gouttes de laudanum. Le calme est plus grand. Des morceaux de glace sont donnés de temps en temps pour calmer la soif, qui est vive. Sommeil de huit heures à neuf heures et demie du soir; pouls à 120. Réveillée, la malade accuse de nouvelles douleurs dans le bas-ventre: nouveau

lavement laudanisé à 10 gouttes. Somnolence sans sommeil. Vers trois heures, le matin, les douleurs reparaissent: troisième lavement avec 10 gouttes de laudanum. On obtient alors environ deux heures de sommeil. La malade a été sondée deux fois depuis l'opération.

Jeudi 20 juillet. La matinée est assez bonne. A onze heures du matin, un bouillon est avalé et ne provoque pas de nausées. Vin et glace pour boissson, par petites quantités à la fois.

L'après-midi, le pouls varie de 110 à 120, la peau est chaude. La malade se plaint presque constamment de douleurs de reins, et fait entendre des plaintes presque incessantes. Il existe quelques coliques. Vers quatre heures, lavement avec 10 gouttes de laudanum. Peu après, il y a un peu de soulagement. Somnolence interrompue par des rêves et des cauchemars. Bouillon vers cinq heures.

La nuit est mauvaise. Le ventre est un peu ballonné; les douleurs de reins sont très-vives; coliques assez rares; nausées, langue un peu sèche, agitation. A onze heures du soir, lavement laudanisé avec 20 gouttes de laudanum. Pouls à 120.

Vendredi 21 juillet. Le matin, amélioration sensible. La malade repose un peu; les douleurs de reins sont diminuées. Un bouillon est pris avec plaisir et bien supporté; vin et glace. La malade a été sondée trois fois en vingt-quatre heures.

Le ventre étant encore un peu ballonné, je fais faire une friction avec l'onguent mercuriel belladoné.

A une heure, la malade prend un nouveau bouillon. On la change de lit. Pouls à 120. La malade urine seule. Vers deux heures, elle est prise de douleurs très-vives, le pouls est très-petit, la face grippée. Lavement laudanisé avec 15 gouttes de laudanum. Sommeil de trois à quatre heures. En se réveillant, la malade accuse un mieux sensible; elle est prise de sueurs abondantes. Elle boit un bouillon et du vin.

Le soir surviennent quelques coliques intermittentes, qui paraissent utérines. La malade a l'air un peu plus forte. Quelques gouttes de sang sont rendues par les parties. Sommeil complet de dix heures à minuit; respiration régulière.

De minuit à deux heures, coliques assez vives, quelques nausées, ventre un peu ballonné. Les frictions avec l'onguent mercuriel ont été continuées. A une heure et demie, lavement laudanisé; puis bientôt calme, sommeil, tranquillité complète jusqu'au matin. La malade a été sondée deux fois pendant la nuit.

Samedi 22 juillet. Le matin, état assez satisfaisant, peau bonne,

langue humide; pouls à 124. Bouillon, eau et vin. La malade est calme et gaie. Cependant le ventre est ballonné, assez douloureux à la pression, surtout à gauche, au-dessus du clamp.

Dans ce point, il existe de la rougeur, de l'empâtement, un véritable commencement de phlegmon.

Bouillon à deux heures. La malade ne pouvant uriner seule, est sondée de nouveau. Vers trois heures, malaise général, nausées, vomituritions, douleurs abdominales vives, respiration plus fréquente; pouls à 130. Les règles, qui ont paru ce matin, continuent à couler.

A cinq heures, lavement avec une poignée de sel de cuisine, suivi bientôt d'une selle copieuse et d'une miction spontanée. Urine rouge; cuisson et douleur des parties génitales. Frictions mercurielles sur le ventre. A huit heures du soir, bouillon.

La nuit paraît devoir être très-mauvaise. Vers onze heures, douleurs très-vives dans l'épaule gauche, arrachant des cris à la malade; douleurs abdominales assez violentes. De temps en temps sueurs froides; langue sèche, un peu fuligineuse.

Lavement laudanisé qui n'est pas gardé. Glace par petits morceaux. 6 gouttes de laudanum dans du vin.

Agitation; subdelirium pendant la somnolence; abattement et prostration. Cataplasme sur le ventre et frictions mercurielles.

Dimanche 23 juillet. A six heures du matin, amélioration trèssensible après une selle spontanée et abondante, mais liquide. Le ventre est redevenu souple et peu douloureux, excepté à l'endroit où semble se former un phlegmon. Bien-être général; soif moins vive. Gargouillement fréquent dans l'abdomen. Pouls tombé à 100 pulsations. A huit heures, la malade prend un bouillon. Le bien-être continue jusque vers onze heures; à ce moment malaise, coliques, ventre plus ballonné.

Vers midi, faiblesse très-grande, face légèrement grippée, ventre météorisé, pouls petit, à 104. Douleur surtout manifeste vers l'épigastre. Calomel, 60 centigrammes.

A trois heures, selle abondante, à la suite de laquelle survient un soulagement très-marqué. Sommeil dans l'après-midi. La malade prend un bol de thé, et boit à plusieurs reprises de l'eau sucrée avec de l'eau-de-vie. A cinq heures, nouvelle selle, accompagnée de la sortie d'une quantité très-considérable de gaz.

A huit heures du soir, bouillon et vin.

La malade est sondée à huit heures du soir. Elle dort un peu ; mais son sommeil est agité, et elle se plaint d'une douleur vive dans

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