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changement; ensorte qu'à chaque événement attendu, nous ne sommes point, comme à chaque tirage d'une loterie, ramenés au même état d'indécision sur ce qui doit arriver. Mais à mesure que l'on multiplie les observations. de ces événemens, la comparaison de leurs résultats avec ceux des loteries devient plus

exacte.

Par une illusion contraire aux précédentes, on cherche dans les tirages passés de la loterie de France, les numéros le plus souvent sortis, pour en former des combinaisons sur lesquelles on croit placer sa mise avec avantage. Mais vu la manière dont le mélange des numéros se fait à cette loterie, le passé ne doit avoir sur l'avenir, aucune influence. Les sorties plus fréquentes d'un numéro ne sont que des anomalies du hasard j'en ai soumis plusieurs au calcul, et j'ai constamment trouvé qu'elles étaient renfermées dans des limites que la supposition d'une égale possibilité de sortie de tous les numéros, permet d'admettre sans invraisemblance.

Dans une longue série d'événemens du même genre, les seules chances du hasard doivent quelquefois offrir ces veines singulières de bonheur ou de malheur, que la plupart des joueurs ne manquent pas d'attribuer à une sorte de fatalité. Il arrive souvent dans

les jeux qui dépendent à-la-fois du hasard et de l'habileté des joueurs, que celui qui perd, troublé par sa perte, cherche à la réparer par des coups hasardeux qu'il éviterait dans une autre situation : il aggrave ainsi son propre malheur, et il en prolonge la durée. C'est cependant alors, que la prudence devient nécessaire, et qu'il importe de se convaincre que le désavantage moral attaché aux chances défavorables, s'accroît par le malheur même.

Le sentiment par lequel l'homme s'est placé long-temps, au centre de l'univers, en se considérant comme l'objet spécial des soins de la nature, porte chaque individu à se faire le centre d'une sphère plus ou moins étendue, et à croire que le hasard a pour lui des préférences, Soutenus par cette opinion, les joueurs exposent souvent des sommes considérables, à des jeux dont ils savent que les chances leur sont contraires. Dans la conduite de la vie, une semblable opinion peut quelquefois avoir des avantages; mais le plus souvent, elle conduit à des entreprises funestes. Ici, comme en tout, les illusions sont dangereuses, et la vérité seule est généralement utile.

Un des grands avantages du calcul des probabilités, est d'apprendre à se défier des premiers aperçus. Comme on reconnaît qu'ils.

trompent souvent, lorsqu'on peut les soumettre au calcul; on doit en conclure que sur d'autres objets, il ne faut s'y livrer qu'avec une circonspection extrême. Prouvons cela par des exemples.

Une urne renferme quatre boules noires ou blanches, mais qui ne sont pas toutes de la même couleur. On a extrait une de ces boules, dont la couleur est blanche, et que l'on a remise dans l'urne pour procéder encore à de semblables tirages. On demande la probabilité de n'extraire que des boules noires, dans les quatre tirages suivans.

Si les boules blanches et noires étaient en nombre égal, cette probabilité serait la quatrième puissance de la probabilité d'extraire 1÷4 une boule noire à chaque tirage; elle serait donc. Mais l'extraction d'une boule blanche au premier tirage, indique une supériorité dans le nombre des boules blanches de l'urne; car si l'on suppose dans l'urne, trois boules blanches et une noire, la probabilité d'en extraire une boule blanche est ; elle est, si l'on suppose deux boules blanches et deux noires; enfin, elle se réduit à, si l'on suppose trois boules noires et une blanche. Suivant le principe de la probabilité des causes, tirée des événemens, les probabilités de ces trois suppositions sont entre elles, comme les

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quantités,,; elles sont par conséquent égales à 3,, . Il y a ainsi cinq contre un à parier que le nombre des boules noires est inférieur, ou tout au plus égal à celui des blanches. Il semble donc que d'après l'extraction d'une boule blanche au premier tirage, la probabilité d'extraire de suite quatre boules noires, doive être moindre que dans le cas de l'égalité des couleurs, ou plus petite qu'un seizième. Cependant cela n'est pas, et l'on trouve par un calcul fort simple, cette probabilité plus grande qu'un quatorzième. En effet, elle serait la quatrième puissance de, de et de 444 , dans la première, la seconde et la troisième des suppositions précédentes sur les couleurs des boules de l'urne. En multipliant respectivement chaque puissance, par la probabilité de la supposition correspondante, ou par 3, et; la somme des produits sera la probabilité d'extraire de suite, quatre boules noires. On a ainsi pour cette probabilité, 33, fraction plus grande que . Ce paradoxe s'explique en considérant que l'indication de la supé riorité des boules blanches sur les noires par le premier tirage, n'exclut point la supériorité des boules noires sur les blanches > supériorité qu'exclut la supposition de l'égalité des couleurs. Or cette supériorité, quoique peu vraisemblable, doit rendre la probabilité

d'amener de suite, un nombre donné de boules noires, plus grande que dans cette supposition, si ce nombre est considérable; et l'on vient de voir que cela commence, lorsque le nombre donné est égal à quatre.

Considérons encore une urne qui renferme plusieurs boules blanches et noires. Supposons d'abord qu'il n'y ait qu'une boule blanche et une noire. On peut alors parier avec égalité, d'extraire une boule blanche, dans un tirage. Mais si l'urne renferme trois boules dont deux soient noires; il semble que pour l'égalité du pari, on doive donner deux tirages à celui qui parie d'extraire la boule blanche. On doit en donner trois, si l'urne renferme trois boules noires et une blanche, et ainsi du reste; ensorte que pour compenser par le nombre des tirages, l'inégalité des chances, il faut donner autant de tirages qu'il y a de chances contraires : on suppose toujours qu'après chaque tirage, la boule extraite est remise dans l'urne. Mais il est facile de se convaincre que ce premier aperçu est erroné. En effet, dans le cas de deux boules noires sur une blanche, la probabilité d'extraire de l'urne, deux boules noires en deux tirages, est la seconde puis sance de ou; mais cette probabilité ajoutée à celle d'amener une boule blanche en deux tirages, est la certitude ou l'unité ;

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