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mesure de répondre à ma note du 22 février relative au Canal de Suez. Il m'a dit que la minute de sa réponse venait d'être envoyée dans les bureaux et que je ne tarderais pas à la recevoir. WADDINGTON.

No 7. M. de Freycinet à M. Waddington.

(Télégramme)

Paris, le 7 mars 1886.

Le délai que met Lord Rosebery à vous fournir la réponse que vous lui avez demandée touchant le Canal de Suez me fait craindre qu'il n'y ait quelque fondement dans les bruits qui circulent avec une certaine persistance sur les intentions du Gouvernement anglais à l'égard de l'Egypte.

Il importe que notre attitude ne puisse pas être interprétée, à aucun moment, comme un acquiescement plus ou moins résigné à un dénouement aussi contraire à nos légitimes espérances qu'aux déclarations formelles de M. Gladstone. Je vous prie de saisir la première occasion d'entretenir le chef du Cabinet de cette question. Vous déclarerez en termes amicaux, mais très nets, à M. Gladstone que jamais la France ne consentira à l'absorption de l'Egypte par une puissance quelconque et que nous nous y opposerions par tous les moyens en notre pouvoir.

La réponse du Cabinet de Londres relativement au Canal de Suez sera pour nous un indice qu'il convient de ne pas négliger.

C. DE FREYCINET.

No 8. M. de Freycinet à M. Waddington.

(Télégramme)

Paris, le 10 mars 1886.

J'ai cru devoir entretenir Lord Lyons des diverses démarches que vous aviez faites auprès du Cabinet britannique relativement au Canal de Suez et, en dernier lieu, de la note que vous avez remise à Lord Rosebery, le 22 février. J'ai prié Lord Lyons de vouloir bien provoquer une réponse prochaine de son Gouvernement. De votre côté, je vous serai obligé d'insister dans le même sens. C. DE FREYCINET.

No 9. M. Waddington à M. de Freycinet.

(Télégramme)

Londres, le 10 mars 1886.

Aujourd'hui, Lord Rosebery m'a dit que la réponse du Gouvernement anglais relative au Canal de Suez était en ce moment entre les mains de M. Gladstone et que je la recevrai demain ou après-demain. Je n'ai pu voir le Premier Ministre. Il n'a pas quitté sa chambre depuis samedi soir, à la suite d'un refroidissement. WADDINGTON.

No 10. M. Waddington à M. de Freycinet.

Londres, le 11 mars 1886.

J'ai reçu ce matin la réponse du Gouvernement anglais au sujet du Canal de Suez annoncée par mon télégramme d'hier. Ainsi que je vous le disais, elle avait été soumise à M. Gladstone et elle peut être considérée comme l'expression d'une décision réfléchie du Gouvernement de la Reine. Elle conclut à un ajournement nouveau de la discussion de la question.

Jusqu'à présent, Lord Rosebery a décliné toute conversation relative au Canal de Suez, se référant toujours à la réponse écrite qu'il comptait m'adresser. WADDINGTON.

ANNEXE A LA DÉPÊCHE DE LONDRES EN DATE DU 11 MARS 1886.

Le Comte de Rosebery, Secrétaire d'Etat pour les Affaires étrangères à M. Waddington, Ambassadeur de la République française à Londres.

Monsieur l'Ambassadeur,

(Traduction)

10 mars 1886.

Le Gouvernement de Sa Majesté a donné toute son attention à la note que Votre Excellence m'a fait l'honneur de m'adresser le 22 du mois dernier, pour proposer que les deux Gouvernements reprissent la discussion des arrangements internationaux pour la libre navigation du Canal de Suez, en vue d'une entente sur les termes d'un projet de Convention qui pourrait ensuite être soumis à l'acceptation des autres Puissances.

J'ai à peine besoin d'assurer Votre Excellence du sérieux désir du Gouverneinent de Sa Majesté d'être en harmonic avec le Gouvernement français sur cette importante question, et de vous dire que nous serions tout disposés à porter notre attention sur les moyens de concilier les divergences de vues auxquelles ont donné lieu les discussions de la Commission de Paris, si l'on pouvait atteindre ce résultat de manière à assurer l'adhésion unanime des Gouvernements intéressés. Mais il y a diverses considérations qui nous paraissent de nature à nous amener à cette conclusion que le moment présent ne serait pas favorable à la reprise des négociations sur ce sujet, et nous préférerions, pour ce motif, que l'examen de la question fût ajourné. ROSEBERY.

No 11. M. de Freycinet à M. Waddington.

Paris, le 13 mars 1886.

Votre lettre du 11 de ce mois m'annonce qu'en réponse à la note que vous lui avez remise le 22 février, relativement à la reprise des pourparlers pour la réglementation du Canal de Suez, Lord Rosebery vous a fait connaitre que des « que des considérations diverses » le déterminaient à ajourner l'examen de cette question.

Je ne puis attribuer qu'à un véritable malentendu la réponse que vous a faile Lord Rosebery. La question du régime du Canal de Suez n'appartient, en effet, ni à la France ni à l'Angleterre, et il n'est loisible à aucune de ces deux Puissances de l'éluder. Cette question appartient à l'Europe entière qui l'a prise en main pratiquement, au commencement de l'année 1885, sur l'initiative de la Grande-Bretagne elle-même. Un acte international a été signé à Londres, le 17 mars 1885. Aux termes de cet acte, les Puissances se sont engagées, d'une part, à faciliter et à garantir un emprunt que l'Egypte était dans la nécessité de contracter, d'autre part, à assurer, par une Convention spéciale, le régime de libre navigation du Canal de Suez. La première de ces deux tâches, qui avait pour l'Angleterre un intérêt particulier, a été accomplie; la seconde, qui intéresse le monde entier, a été entamée. Une Commission dans laquelle l'Angleterre avait ses Représentants s'est réunie à Paris, le 30 mars; après deux mois et demi de délibérations, elle a abouti, le 13 juin, à la double rédaction que vous connaissez. A ce moment, les travaux ont été, non pas abandonnés, mais suspendus, à raison de la retraite du Cabinet de M. Gladstone. Les

Puissances consultées par nous sur la suite à donner à l'affaire ont été d'avis que les négociations, pour arriver à un texte commun, pourraient être continuées de Cabinet à Cabinet et que, finalement, il conviendrait que la France et l'Angleterre présentassent aux autres Puissances une rédaction sur laquelle elles se seraient mises préalablement d'accord. C'est donc un devoir pour les deux Cabinets d'établir cette formule transactionnelle, ou tout au moins de le tenter.

Dans ce but, nous avons, à diverses reprises, depuis le mois de juin, offert au Cabinet anglais de travailler de concert à rédiger cette formule, et même nous avous proposé de lui soumettre un texte sur lequel il n'aurait plus qu'à présenter ses observations. Le Cabinet de Lord Salisbury, acceptant en principe ce mode de procéder, nous a priés d'en différer l'application. La date récente de son avénement au pouvoir, les complications qui sont survenues en Europe, finalement les élections anglaises et l'imminence d'un changement ministériel ne permettaient guère, il faut le reconnaître, à Lord Salisbury d'aborder l'examen d'une aussi grave affaire. Les mêmes raisons n'existent pas pour le nouveau Cabinet. Son chef est familier avec une question dont il a été lui-même l'initiateur et dont il retrouve l'élaboration au point où il l'a laissée; l'Europe est plus tranquille qu'elle ne l'a été depuis un an; on ne s'expliquerait donc pas un nouvel ajournement. L'Europe serait en droit de nous demander compte du maudat qu'elle a remis entre nos mains et que nous semblerions laisser en souffrance.

Nous avons trop le sentiment de notre responsabilité pour rester dans cette situation indécise. Nous prions le Cabinet de Sa Majesté Britannique de vouloir bien nous aider à la définir. S'il n'a besoin que de quelques jours encore pour reprendre cette étude, nous sommes tout prêts à remettre à une date ultérieure l'envoi du texte transactionnel que nous avons élaboré et que nous croyons de nature à satisfaire aux convenances du Gouvernement anglais. Si, au contraire, pour des motifs que nous n'avons pas à approfondir, le Cabinet de M. Gladstone croit devoir refuser une telle négociation, nous aurons à faire connaître la situation aux Puissances qui ont participé aux travaux de la Commission de Paris, et à les mettre en mesure d'adopter telle ligne de conduite qu'elles trouveront convenable.

Vous pourrez, si vous le jugez utile, donner lecture de cette lettre à Lord Rosebery, et même lui en donner copie, s'il le désire. C. DE FREYCINET.

No 12. M. de' Freycinet à M. Waddington.

(Télégramme)

Paris, le 17 mars 1886. Lord Lyons vient de me demander aujourd'hui, de la part de Lord Rosebery, si je ne consentirais pas à lui communiquer, à titre privé, une rédaction sur laquelle le Secrétaire d'Etat pour les Affaires étrangères pourrait se faire une opinion avant d'ouvrir des pourparlers officiels. J'ai répondu que je m'y prêterais volontiers, et que la procédure m'importait peu, pourvu que nous arrivions à un accord. Il a été convenu que je remettrais incessamment cette rédaction à Lord Lyons. Je ne manquerai pas de vous la faire connaitre.

Au cours de la conversation, Lord Lyons a bien voulu me dire, de la

part de Lord Rosebery, que celui-ci avait envisagé l'ensemble de nos procédés sur la question, et qu'il reconnaissait qu'ils avaient eu le caractère le plus amical à l'égard de l'Angleterre.

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Lord Rosebery, à qui j'ai donné lecture de votre dépêche relative au Canal de Suez, ne m'a pas demandé de lui en laisser copie. Pendant la lecture, il m'a fait observer qu'il avait eu bien peu de temps, depuis son arrivée aux affaires, pour étudier une aussi grosse question et que l'état de l'Europe ne lui paraissait pas aussi favorable qu'à vous pour la reprise des négociations.

La conversation s'est ensuite engagée sur le fond; j'ai beaucoup insisté sur l'effet fâcheux que sa réponse à ma note du 22 février avait produit sur le Gouvernement de la République, et je n'ai pas hésité à lui dire que nous l'avions comprise comme un refus de négocier. Là-dessus, il s'est récrié, disant que ce n'était qu'un ajournement.

Je lui ai dit que j'étais heureux de constater que sa dépêche devait être interprétée d'une façon moins absolue que nous ne l'avions pensé d'abord. WADDINGTON.

No 14. M. de Freycinet à M. Waddington

Paris, le 24 mars 1886.

Je vous ai déjà annoncé, par un télégramme du 17 de ce mois, que Lord Lyons m'avait demandé, de la part de Lord Rosebery, si je ne consentirais pas à lui communiquer, à titre privé, une rédaction relative au projet de traité pour assurer le libre usage du Canal de Suez, rédaction sur laquelle le Secrétaire d'Etat pour les Affaires étrangères pourrait se faire une opinion, avant d'ouvrir des pourparlers officiels. J'ai répondu que la procédure m'importait peu et que j'adopterais celle qui conviendrait au Gouvernement anglais, pour arriver à un accord que les circonstances out différé si longtemps. Il a été convenu que je remettrais incessamment à Lord Lyons la rédaction qu'il désirait, et je vous ai promis en même temps de ne pas manquer de vous la faire connaître. Vous en trouverez le texte ci-joint.

Comine vous le savez, le dissentiment entre le Gouvernement anglais et la plupart des autres Gouvernements représentés à la Conférence de Paris ne portait que sur un petit nombre de points, à savoir sur la rédaction des articles 5, 6, 9, 10, 11 et 16 du projet de traité. L'écart entre les deux rédactions ne m'a pas paru assez considérable pour qu'on ne pût pas, grâce à une bonne volonté réciproque, aboutir promptement à un accord.

En ce qui concerne l'article 5, le dissentiment portait sur la question de savoir où serait fixée, dans les approches du Canal de Suez, la limite en deçà de laquelle ne pourrait être accompli aucun acte ayant pour but de préparer directement une opération de guerre. A la rédaction de la majorité de la Commission, les délégués de la Grande-Bretagne proposaient

d'en substituer une autre. Les mots : ou ses approches (du Canal), ainsi que dans les ports d'accès, ni dans les eaux territoriales de l'Egypte, devaient être remplacés par ceux-ci : et ses ports d'accès, ainsi que dans un rayon de trois milles marins de ces ports. Je suis disposé à me rallier à la rédaction des délégués anglais et je propose de dire qu'aucun acte d'hostilité, ou aucun acte ayant pour but de préparer directement une opération de guerre, ne pourra être exercé dans le canal ou ses approches, ainsi que dans les ports d'accès, ou dans les eaux territoriales aux deux extrémités du canal. Le reste comme au projet.

Pour l'article 6, j'estime que la rédaction de la majorité de la Commission doit être maintenue. La restriction proposée par l'Angleterre, qui limite au temps de guerre et aux Puissances belligérantes l'interdiction de débarquer, etc., dans le Canal, est trop étroite. L'expression en temps de guerre me parait trop vague, attendu que la guerre existe presque continuellement sur quelque point. La même observation s'adresse aux mots les Puissances belligérantes. Enfin, je ne crois pas utile de faire disparaître de la rédaction les termes qui visent non seulement le Canal, mais ses ports d'accès, qui sont déjà compris dans l'énumération de l'article précédent.

L'article 9 est celui auquel le Gouvernement Britannique a fait la plus vive opposition. Cependant, je n'ai pas cru qu'une transaction entre lui et nous fût impossible à trouver. Assurément le Gouvernement anglais, qui consent à ce que les Représentants des Puissances en Egypte veillent à l'exécution du Traité, ne peut pas s'opposer à ce que nous disions plus explicitement qu'ils en seront chargés. La rédaction anglaise n'ajoute rien à la situation actuelle. En tout temps et en tout pays, les Représentants des puissances veillent à l'exécution des traités; mais, dans le cas actuel, il était bon d'indiquer qu'ils en auraient spécialement le mandat. Pour cela, le Gouvernement anglais a compris que les Représentants des Puissances auraient intérêt à se réunir: toutefois, la rédaction qu'il a proposée ne rendait cette réunion nécessaire que dans des cas très graves guerre, troubles intérieurs, etc. J'ai pensé qu'il convenait de laisser une plus graude latitude aux Représentants des Puissances, et de dire que leur réunion aurait lieu sur la convocation de l'un d'entre eux et sous la présidence de leur doyen, « en toute circonstance qui menacerait la sécurité ou le libre passage du Canal ». De plus, le Gouvernement anglais proposait que les Représentants des Puissances saisissent leurs Gouvernements respectifs des propositions qui leur paraîtraient les plus propres à assurer la protection et le libre usage du Canal. Il est certainement plus conforme à l'esprit général du Traité, tel qu'il ressort en particulier des articles 10 et 11, que les Représentants de l'Europe saisissent directement le Gouvernement égyptien. C'est à celui-ci à voir s'il peut, d'accord avec la Porte suzeraine, suffire aux circonstances, ou s'il a besoin, comme l'y invitent les articles précités, de recourir aux Puissances signataires de la Déclaration de Londres. L'initiative devant venir de lui, c'est à lui que doivent s'adresser les Représentants des Puissances, ce qui ne les empêche pas, bien entendu, d'informer leurs propres Gouvernements. Enfin je voudrais que l'article se terminât par ces mots : « En tout état de cause, ils (les Représentants des Puissances) se réuniront une fois par an pour constater la bonne exécution du Traité ». L'objet de cette disposition additionnelle n'a pas besoin d'être expliqué. Il y a lieu de désirer que les Agents, char

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