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une fin de non recevoir contre son pourvoi, prise du lap de temps qui s'était écoulé depuis le jugement rendu ; ils ont prétendu que son action était prescrite aux termes de l'article 189 du Code de commerce, qui déclare la prescription acquise contre les lettres de change et billets à ordre, aprè, cinq ans, à compter des dernières poursuites.

Mais

le demandeur repoussait cette fin de non recevoir en disant que, cette exception étant un moyen d'extinction de la créanee, et pouvant être contestée avec succès, elle ne pouvait être proposée pour la première fois devant la Cour de cassation, qui n'est instituée que pour connaître des infrac tions à la loi, et non pour juger les contestations des parties; que les défendeurs ne pourraient se faire un moyen de la prescription, devant elle, qu'autant qu'il aurait déjà été proposé devant les tribunaux, puisqu'il leur est défendå de le suppléer (art. 2223 du Code civil); qu'au surplus, ef dan, tous les cas, il faudrait tenir pour certain que, le jugement attaqué n'ayant jamais été notifié, le demandeur n'avait pu être privé de la faculté d'exercer son recours.-Sur le fond, les défendeurs reproduisaient les moyens qu'ils avaient fait valoir devant le tribunal de commerce de Caen ; ils essayaient de justifier le jugement de ce tribunal par les motifs qui l'avaient dicté. Le 28 juillet 1824, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. Brisson président, M. Henry Larivière rapporteur, MM. Rochelle et Mandaroux avocats, par lequel :

à

«LA COUR,-Sur les conclusions conformes de M. Jourde, avocat-général;-Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de cinq ans établie par l'art. 189 du Code de commerce contre << toutes actions relatives aux lettres de change, « et à ceux des billets à ordre souscrits par des négocians, « marchands ou banquiers, ou pour faits de commerce, compter du jour du protêt ou de la dernière poursuite ju«ridique, s'il n'y a eu condamnation, ou si la dette n'a été « reconnue par acte séparé »; Attendu que le délai de trois mois pour le recours en cassation ne commence à courir que du jour de la signification de l'arrêt ou du jnge

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ment en dernier ressort à personne ou domicile,, et qu'il n peat résulter du laps de temps une fin de non recevoir qu'au tant que les trois mois sont expirés; — Attendu que, dan l'espèce, il n'est pas méconnu que le jugement attaqué n' jamais été signifié à personne ou domicile, et qu'ainsi le pourvoi se trouve formé en temps utile, quoique le jugemen ait été rendu le 5 septembre 1812 et que le pourvoi n'ait e lieu que le 24 mai 1821 : d'où il suit que la prescription d cinq ans établie par l'art. 189 du Code de commerce n'es pas applicable au recours du demandeur;—REJETTE la fin de non recevo ir;

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« Aufond, -Va les art. 161, 162, 165, 167, et 168 du Code de commerce; Considérant qu'il est constant en point de fait que le protêt de la lettre de change dont il s'agit a été fait, faute de paiement, le 11 juillet 1810, lendemain de l'échéance, et que le demandeur a fait notifier le protêt au sieur Harel, tireur, le 26 du même mois, avec assignation devant le tribunal de commerce de Caen, pour se voir condamner solidairement avec l'accepteur au paiement de la lettre de change, avec intérêts et dépens; qu'ainsi la dénonciation du protêt et la demande en garantie contre le tireur ont eu lieu dans le délai de quinzaine fixé par les art. 165 et 167 du Code de commerce: d'où il suit que le demapdeur n'a pas encouru de déchéance pour l'exercice de la demande en garantie; Considérant que les articles précités ni aucun autre article du Code de commerce n'exigent, à peine de nullité, que le porteur donne suite à la dénonciation da protêt, à l'assignation en paiement, et qu'il obtienne un jagement de condamnation contre le tireur ou les endosseurs, pourvu qu'il ne laisse pas périr l'instance; Considérant

que dans l'espècé le demandeur n'a été déclaré déchu de son action en garantie contre le sieur Harel, tireur, que sons le prétexte qu'il a abandonné son action, puisqu'il n'a pas ob tenu de jugement contre le tireur sur l'assignation du 26 juillet 1810, quoiqu'il ne se soit pourtant écoulé que deux ans et quelques jours depuis cette époque jusqu'aux 29 juillet

et 3 août 1812, date des nouvelles assignations données au tireur et à l'endosseur, à la requête du demandeur, devant le tribunal de commerce de Caen, à l'effet de les faire condam ner solidairement au paiement de la lettre de change, avec intérêts et dépens; d'où il suit que le tribunal de commerce de Caen a commis un excès de pouvoir en créant une nullité qui n'est établie par aucune loi, et qu'il a violé les articles précités du Code de commerce en refusant au demandeur le droit de garantie que ces articles lui confèrent;- Par ces motifs, CASSE. »

J. L. C.

COUR D'APPEL DE PARIS.

Dans le cas d'une donation faite à un individu qui émigra après avoir eu la saisine des biens donnés, et lorsque ces biens, ayant été séquestrés pour cause de son émigration, n'ont pas été vendus, la remise doit-elle en étre faite à ce donataire, et non aux héritiers naturels du donateur? (Rés. aff.)

En d'autres termes, les héritiers naturels du donateur sont-ils, dans ce cas, préférables au donataire? (Rés. nég.)

LA BARONNE D'ORDRE,. C. LE MARQUIS DE RougÉ.

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La duchesse d'Elbeuf fit donation au sieur PierreFrançois de Rouge, le 2 mai 1749, dans son contrat de máriage avec la demoiselle de Coëtmen, de la somme de 500,000 fr. dont elle se réserva la jouissance pendant sa vie. Il fut dit dans l'acte de donation que cette somme démeuret spécialement affectée ethypothéquée sur la terre de Moreuil, appartenante à la donatrice, sur le prix de laquelle le donataire aurait le droit de s'en faire payer, à moins qu'il ne préférât prendre ladite terre elle-même en paiement, ce qu'il avait la faculté d'opter dans l'année du décès de la donatrice. Celle-ci greva de substitution au profit des enfans mâles du sieur de Rougé et de ses des

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cendans soit les biens qui seraient acquis avec la somme donnée, dont elle imposait au donataire l'obligation de faire emploi, soit la terre de Moreuil, dans le cas où serait faite l'option indiquée.

Le sieur Pierre de Rougé étant mort, Jean-CatherineAlexis de Rougé son fils recueillit dans sa succession les effets de la susdite donation. Il se maria le 29 septembre 1776, et il déclara, dans son contrat de mariage, apporter la nue propriété de la somme de 500, 000 fr. qui avait été donnée à son père et dont il avait hérité. — Il mourut à son tour, le 9 juillet 1783, laissant pour héritier le marquis de Rougé, partie au procès. Les lois abolitives des substitutions, rendues les 25 octobre et 14 novembre 1792, fixèrent irrévocablement sur sa tête les effets de la donation faite à son aïeul par la duchesse d'Elbœuf. Celle-ci mourut aussi, le 28 pluviôse de l'an 2, et l'usufruit qu'elle s'était réservé prit fin. Le marquis de Rougé ne tarda pas à émigrer; plusieurs des héritiers de la duchesse d'Elbœuf émigrèrent aussi. En conséquence, le séquestre fut mis tant sur les biens de la succession de cette dernière que sur ceux appartenans au marquis de Rougé, et notamment sur la terre de Moreuil.

Les lois rigoureuses rendues contre les émigrés pendant la révolution ayant fait place à une législation plus douce, les héritiers de la duchesse d'Elbœuf demandèrent et obtinrent leur amnistie. Ils s'adressèrent ensuite à l'administration pour réclamer la mainlevée du séquestre qui avait été mis sur les biens de la succession; puis ils présentèrent un second mémoire, tendant à ce que la donation faite au sieur de Rougé par la duchesse d'Elbaf, et la substitution qui y était attachée, fussent déclarées abolies et sans effet, et qu'il fût ordonné que les biens qui en faisaient l'objet seraient et demeureraient compris dans ladite succession et soumis au partage entre tous les héritiers de la duchesse d'Elbœuf, conformément à la loi du 17 nivôsé an 2. —L'administration centrale du département de la

Seine, tout en reconnaissant que les réclamans étaient habiles à se porter héritiers de la duchesse d'Elbœuf, refusa d'accueillir la seconde partie de leur demande. Elle considéra que le marquis de Rouge avait été saisi de ce qui faisait l'objet de la donation faite à son aïeul, tant comme héritier de son père qu'en vertu de la substitution qui y était apposée; et que la république, se trouvant aux droits du marquis de Rougé, émigré, avait recueilli pour lai les bien compris en la donation: en conséquence, elle ordonna que les seules coupes arriérées des bois de haute futaie en âge d'être coupés à l'époque de la mort de la duchesse d'Elhouf, feraient partie de la succession de cette dernière, et elle déclara n'y avoir lieu à délibérer sar le surplus des demandes des héritiers.

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Quelque temps après, le marquis de Rongé fut rayé de la liste des émigrés; il obtint la restitution de ceux de ses biens qui n'avaient pas été vendus, à l'exception de ceux qui étaient consacrés à un service public, et il fut envoyé én possession de la terre de Moreuil, sauf les bois en dépendaus, qui furent retenus par le gouvernement, en vertu de l'arrêté du 24 thermidor an 9. Cet envoi en possession fut la conséquence de Poption qu'il fit, en vertu de la facalté qui lui en était accordée par la donation du 2 mai 1749, par acte du prairial an 10, dans l'année de sa rentrée en France, et qu'il n'avait pu faire plus tôt, à cause de son état d'émigration, par lequel il déclara renoncer à sa qualité d'héritier pour partie daus la ligue paternelle de la duchesse d'Elboeuf, pour s'en tenir à ladite donation.

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A la suite des événemens de 1814, et par ordonnance royale du 25 juinì de la même année, le marquis de Rouge, obtint la restitution des bois dépendans de la terre de Moreuil, qui avaient été retenus par le gouvernement lorsqu'il fut envoyé en possession de cette terre.

Les choses restèrent en cet état jusqu'à l'époque du 20 décembre 1825, à laquelle la baronne d'Ordre, se fondant sur la loi du 5 décembre 1814, soutint qu'aux termes de l'art. Tome ler de 1825.

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