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de cette loi, les biens séquestrés pour cause d'émigration devaient être rendus, non aux donataires des précédens propriétaires, mais à leurs héritiers naturels, existans lors de sa publication; elle prétendit qu'à ce titre, et en sa qualité l'héritière naturelle de la duchesse d'Elbœuf, c'était à elle, et non au marquis de Rougé, que devaient appartenir les bois dont celui-ci avait obtenu la restitution, et elle le fit assigner, devant le tribunal de première instance de la Seine, pour se voir condamner à lui en faire le délaissement avec restitution des fruits à dater de son entrée en jouissance.

Le marquis de Rougé combattit cette demande, qu'il soutint devoir être déclarée irrecevable et mal fondée. Nous nous dispenserons d'analyser sa défense, dout les moyens furent couronnés d'un plein succès et servirent de base aux motifs du jugement qui fut rendu le 16 juillet 1823, et par lequel la baronne d'Ordre fut déboutée de ses prétentions. Ces motifs sont pris de ce que,« par le contrat de mariage du 2 mai 1749, la duchesse d'Elbeuf donna au marquis de Rouge, aïeul du marquis de Rougé, partie dans la cause, à charge de substitution et sous réserve d'usufruit, la somme de 500,000f., enpaiement de laquelle il aurait droit de prendre la terre de Moreail avec toutes ses dépendances, quelle que pût être, à l'extinction de l'usufruit, l'augmentation de la valeur de ladite ter re; qu'il fut stipulé qu'en cas d'option de la terre par le donataire ou les appelés, à la substitution, cette terre serait transmise. auxdits appelés, audit titre de substitution; que de l'ensemble de ces termes il résulte qu'en, vertu de cette donation, le marquis de Rougé a eu droit soit à ladite somme de 500,000 fr., soit à la terre de Moreuil, suivant l'option qu'il avait le droit d'en faire; que, par l'effet de l'option que fe marquis de Rougé a faite de cette terre, il en est devenu définitivement propriétaire avec toute l'étendue que lui donnait la donation; que, si la restitution des bois ne lui a pas été faite au moment de la mise en possession de la terre, c'est qu'une législation particulière formait alors obstacle à cette remise; et enfin que, cet obstacle se trouvant levé par la disposition

de la loi du 5 décembre 1814, qui a rendu les biens invendus aux anciens propriétaires, c'est le marquis de Rougé seul qui a dû profiter de cette remise ».

La baronne d'Ordre a appelé de ce jugement; elle a reproduit à l'appui de son appel les moyens qu'elle avait proposés devant les premiers juges. Le marquis de Rougé a conclu à la confirmation pure et simple du jugement attaqué, par les motifs qui l'avaient dicté,

Le 27 avril 1824, ARRÊT de la cour royale de Paris, 1 re chambre, M. le baron Séguier premier président, MM. Bonnet père et Lamy avocats, par lequel :

« LA COUR, - Sur les conclusions de M. de Vergès, conseiller-auditeur, pour M. le procureur-général; - Considérant qu'à l'époque de la donation du 2 mài 1749, soit de la somme de 500,000 fr., soit de la terre de Moreuil, au choix du donataire de Rougé, les bois dont il s'agit faisaient partie de la terre de Moreuil; Considérant qu'il y a eu sai

sine du donataire opérée dès l'instant même de la donation, et qui a rendu la terre de Moreuil indisponible dans les mains des héritiers de la duchesse d'Elbeuf, donatrice; que l'option dont le droit s'est ouvert au profit du donataire en 1794, époque du décès de la duchesse d'Elbœuf, á quelque époque que cette option ait pu être, et ait été faite, a constitué le marquis de Rongé propriétaire de la terre de Moreail et de toutes ses dépendances dès l'époque de 1794; que le séquestre et toutes ses conséquences, quant à cette terre et chacune de ses dépendances, n'ont pu être, et, en fait, n'ont été établis que sur le marquis de Rongé, ainsi que le constatent les actes administratifs du 8 ventôse an 8 et des années 11 et 12; A Mis et MET l'appellation au néant; ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, etc. » J. L. C.

COUR D'APPEL DE ROUEN,

Les époux qui sé marient en communauté peuvent-ils néan

moins stipuler que les biens immeubles de la femme seront inaliénables, en tout ou en partie? (Rés. aff.) Cod. *eiv., art. 1395.

Néanmoins, lorsque le contrat ne présente à cet égard qu'une limitation du droit du mari, pendant la communauté, si la femme fait prononcer sa séparation de biens et reprend ainsi la libre administration de ceux qui lui appartiennent, recouvre-t-elle la faculté d'aliéner ses immeubles, avec le consentement de son mari ou l'autorisation de la justice ? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 1449.

MONTGRARD, C. LA DAME DORE.

Par leur contrat de mariage, passé à Rouen le 3 nivôše an 13, les sieur et dame Doré ont stipulé qu'ils se mariaient sous le régime de la communauté, laquelle serait réglée de la manière ci-après exprimée. Viennent plusieurs articles qui semblent destinés à allier aux avantages de la communauté les garanties du régime dotal. L'art. 8 surtout porte: « Tous les biens meubles et immeubles sans exception qui «< écherront aux futurs époux, pendant leur mariage, par << successions directes et collatérales, et qui leur seront don « nés et légués, n'entreront pas dans ladite communauté, en étant par eux exceptés formellement au contraire, ils tiendront nature de propres audit sieur futur époux, quant « à ceux qui écherront et viendront de son côté, et « d'augmentation de dot à la demoiselle future épouse pour

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autant qu'il lui en sera échu et provenu de son chef, comme devant est dit. A cet effet, ledit sieur futur époux, en ce qui « concerne la demoiselle future épouse, sera tenu, lorsqu'il écherra des successious à cette dernière et qu'il lui sera fait « quelques donations et legs, de les faire constater sur-lechamp par bons et fidèles inventaires faits par officiers publics et même par estimation par experts, pour, après aces formalités et les dettes et charges payées, être par lui « placé le net produit de ces successions, dons et legs, et même les capitaux des rentes qui seront remboursées à la

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• dite future épouse de son chef, pendant ledit mariage, en acquisitions de biens immeubles, soit de ville, soit ruraux,' en la présence et de l'agrément de ladite future épouse, a qui les acceptera avec les subrogations convenables; et les« dits biens lui tiendront aussi nature d'augmentation de dot • ́et lui serviront de remplacement propriétaire incommua table...

Et l'art. 9 est ainsi conçu : « Le sieur fatur époux demeure autorisé par le présent à vendre, du consentement de la « demoiselle future épouse, les biens immenbles qui pour« ront appartenir à icelle, à quelque titre que ce soit, situés a dans la ville de Rouen et ses faubourgs seulement, mais a sous la condition expresse que les prix qui en proviendront. seront par lui aussitôt remplacés en acquisitions d'autres « biens immeubles, soit dans ladite ville et ses faubourgs, soit ruraux, aussi au nom, en la présence et de l'agrément <de la demoiselle future épouse, par contrats notariés, con« tenant les déclarations nécessaires pour qu'elle soit pro<priétaire de ces remplacemeus, qu'elle acceptera pareil⚫lement, et qui seront purges de tous priviléges et hypothèques. »

Quoi qu'il en soit, le 27 octobre 1820, la dame Doré, au torisée de son mari, vendit au sieur Montgrard un domaine roral moyennant la somme de 110,000 fr. Ce domaine avait été récueilli i par la dame Doré dans la succession de sa mère. La venderesse déclara qu'elle s'était mariée le 5 nivôse an 13, sous le régime de la communauté, et que depuis quelques années elle avait fait prononcer sa séparation de biens.

Ce ne fut qu'après son contrat que le sieur Montgrard eut connaissance des clauses du contrat de mariage de la dame Doré. Il fit alors signifier à cette dernière qu'ayant un juste sujet de craindre d'être altérieurement troublé dans son acquisition, puisque le domaine qu'il avait acquis avait nature de dot, il ne paierait son prix qu'autant que les époux Doré auraient acquis un immeuble en remplacement de celui qu'ils L'avaient pu valablement aliéuer qu'à cette condition,

La dame Doré répondit à cette signification en actionnant le sieur Montgrard en paiement du prix stipulé par le contrat du 27 octobre 1820. Mais le sieur Montgrard persista à prétendre que les époux Doré ne pouvaient toucher qu'en dounant un remplacement conformément au contrat,

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Jugement du tribunal de Rouen, qui déboute le sieur Montgrard de sa prétention, →→ Considérant, en fait, qu'il était constant que les époux Doré s'étaient mariés sous le régime de la communauté, et que les stipulations de leur contrat n'avaient rien d'incompatible avec ce régime; - Considérant que, quelques modifications que les époux apportent à ce régime, sa nature et les règles qui le constituent sont telles, qu'aucun recours n'est permis sur les biens propres de la femme qui ont été aliénés, et que celle-ci, à défaut de remplacement, n'a de recours que sur les bieus de la communauté ou sur ceux de son mari, lorsque c'est celui-ci qu' a fait l'aliénation; Qu'il n'est, dans le Code civil, qu'une seule disposition, celle de l'art. 1560, d'après laquelle l'acquéreur du bien d'une femme mariée puisse être évincé; mais cet article n'est applicable qu'autant que l'immeuble aliéné est dotal. Or l'immeuble acheté par Montgrård n'était pas bien dotal, mais propre de communauté: dès lors il n'était soumis qu'à l'art. 1450, parce que le régime dotal ne peut être cumulé avec celui de la communauté. Enfin, dans l'art. 9 du contrat de mariage, les prémiers juges n'ont va qu'une restriction de la faculté confégée au mari de vendre les biens de la femme, restrictions qu'on ne pouvait opposer à la femme séparée civilement, qui avait disposé personnellement de son bien.

Appel de la part du sieur Montgrard, qui a soutenu que le contrat de mariage des époux Doré donnait aux biens de la femme tous les caractères de la dotalité; que les premiers juges s'étaient trompés en disant que le régime dotal ne pouvait être cumulé avec celui de la communauté; que l'appe lant avait juste sujet de craindre sur le sort de son acquisition; que dans cette bypothèse il été fondé à demander la

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