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lors, maintenir dans les ateliers où auparavant des enfants travaillaient avec des ouvriers adultes une journée de travail de plus de dix heures, mais par là la situation de ce jeune personnel était compromise. l'apprentissage mis en danger, etc. Sur ce point encore, la Commission rétracte son opinion ancienne, et dans des termes qu'il convient de citer textuellement; après avoir établi pour les six dernières années la statistique des enfants protégés, la Commission remarque : « Il semble résulter de ce tableau que le chiffre du personnel des jeunes ouvriers a été effectivement influencé par la première application, en 1902, de la loi du 30 mars 1900, mais que, depuis cette époque, son importance n'a point varié sensiblement.... Ces recherches semblent prouver que les renvois d'enfants n'ont point eu, dans leur ensemble, un effet aussi important qu'on avait pu le craindre. Cependant, comme ils ne se reproduisaient que dans certaines industries, on comprend que leur répétition ait impressionné les inspecteurs. Nous ajoutons que ces chiffres viennent à l'appui des constatations beaucoup moins pessimistes des rapports de cette année que nous examinerons en détail dans un chapitre suivant. » Ces constatations, il est inutile de les relever; il suffit d'enregistrer l'impression qu'elles ont produite sur l'esprit des membres de la Commission.

La Commission ne pouvait pas être aussi nette dans son appréciation des premiers résultats de la loi du 13 juillet 1906 sur le repos hebdomadaire des ouvriers ou employés de l'industrie et du commerce. D'abord la mise en vigueur de cette loi a été tardive, incomplète, puis elle a été entourée de difficultés de tout ordre; du reste et en tout état de cause, le jugement de la Commission n'aurait pu porter que sur une trop courte période: cinq mois et demi.

Aussi est-elle assez embarrassée dans le choix des paroles qu'elle doit dire, et elle se retire volontiers dans des généralités : la loi du 13 juillet, écrit-elle, attendue avec impatience par les employés du commerce, a été accueillie par eux avec une vive satisfaction; mais, depuis, elle a soulevé des réclamations nombreuses, « dont les unes, sérieuses et justifiées, étaient provoquées par de regrettables inégalités de traitement entre établissements concurrents, tandis que les autres ne visaient à rien moins qu'à faire échec à une législation dont le tort principal était de gêner des habitudes acquises. Cependant, malgré des critiques qui ne lui ont pas été ménagées, la loi sur le repos hebdomadaire, grâce à la jurisprudence régulatrice du Conseil d'État, grâce aussi à un certain nombre de tempéraments apportés

à son application, entre progressivement dans les mœurs ». Mais il faudrait, poursuit la Commission, que ces tempéraments nécessaires soient inscrits dans la législation.

Plus loin, la Commission examine, d'après les rapports des inspecteurs, les chances qu'a d'être mis en vigueur le système de la fermeture obligatoire du dimanche, et elle déclare ces chances. minimes; elle signale « combien les divergences de vues des préfets dans la délivrance de leurs arrêtés d'autorisation ont gêné, dans le début, l'application de la loi ». Surtout, elle indique et discute les multiples difficultés d'interprétation qu'a soulevées cette loi compliquée.

En réalité, il était encore trop tôt pour que la Commission pût rendre compte des résultats de la loi du 13 juillet 1906; son rapport sur l'application des lois ouvrières pendant l'année 1907 sera sans aucun doute plus instructif.

IV.

SUBVENTIONS AUX CAISSES DE CHOMAGE EN 1906.

Le 26 septembre 1907, le ministre du travail a présenté au Président de la République le second rapport annuel, afférent à l'année 1906, sur la répartition du crédit ouvert au budget de son département pour subventions aux caisses de secours contre le chômage involontaire par manque de travail'.

Pour chacun des deux semestres de l'année 1906, le taux des subventions a été fixé, « vu le petit nombre des demandes », aux maxima prévus par les règlements. 45 caisses de chômage ont été subventionnées pour le premier semestre, mais 9 d'entre elles ne l'ont pas été pendant le second, et inversement 19 caisses ont été pour la première fois subventionnées durant cette dernière période; il ressort de là que 36 caisses seulement ont été subventionnées pendant toute l'année.

Sur ces 36 caisses, 3 caisses fédérales (les seules de cette espèce qui soient subventionnées) celles de la Fédération française des travailleurs du livre, de la Fédération des ouvriers mécaniciens et parties similaires de France, et de la Fédération lithographique française, ont reçu « plus des trois quarts du montant total des subventions de l'année », et les 5 caisses comptant plus de 1,000 adhérents (les 3 caisses fédérales ci-dessus, la caisse de la Chambre syndicale

1. Bulletin de l'Office du travail, octobre 1907, p. 1038 et suiv.

des ouvriers en instruments de précision du département de la Seine et la caisse de la Chambre syndicale des employés de Paris, soit un total de 28,394 adhérents) ont reçu « les cinq sixièmes du montant total des subventions ». Le dernier sixième ayant été réparti entre les 39 caisses qui, indépendamment des 5 caisses dont il vient d'être question, ont été subventionnées pour l'un ou l'autre semestre, il n'y a pas lieu d'en parler.

Voici, dans ce qu'elle a de plus saillant, la conclusion que donne à son rapport le Ministre du travail : « Ces résultats sont encore modestes. Sur un crédit de 110,000 francs, 42,495, soit moins de la moitié, ont été répartis. Il y a cependant progrès assez sensible sur l'année 1905'. Le nombre des caisses subventionnées a passé de 47 à 64, dont 3 caisses fédérales au lieu de 2 l'année précédente. Étant donné l'effort réel qu'exigent, de la part des travailleurs, la création et le fonctionnement régulier d'une caisse de chômage, il ne faut pas s'attendre à un développement beaucoup plus rapide de ces institutions si utiles... On doit cependant compter sur une nouvelle extension, en 1907, du service des subventions. D'une part, 19 caisses ont pour la première fois participé aux subventions afférentes au second semestre de 1906, et d'autre part un certain nombre de caisses ont été fondées au cours du même semestre 2. >>

V. SESSION DU CONSEIL SUPÉRIEUR DU TRAVAIL.

Au cours de sa session de novembre 1906, le Conseil supérieur du travail n'avait pas eu le temps d'examiner le rapport présenté par sa Commission permanente sur l'affichage des lois ouvrières; c'est par la discussion de ce rapport qu'il a commencé sa session de novembre

1. Les espérances que ces lignes font concevoir ne se sont pas réalisées, du moins pendant le premier semestre de l'année 1907. 50 caisses ont été subventionnées au lieu de 55 caisses pour le second semestre de l'année 1906. D'autre part, pour le premier semestre de 1907, les subventions allouées n'ont atteint que la somme de 14,031 francs (contre 24,913 pour le semestre précédent); des cinq semestres compris entre le 1er janvier 1905 et le 30 juin 1907, c'est le chiffre le plus bas, sauf un (le premier semestre de 1905, 13,482 francs) (Bulletin de l'Office du travail, janvier 1908, p. 25).

2. Il ne faut pas oublier qu'un décret du 31 décembre 1906 (mentionné dans notre Chronique de l'année dernière) a augmenté d'une façon notable les facilités jusque-là données aux caisses de chômage pour leur participation au fonds de subvention, et que les dispositions de ce décret ont été appliquées pour la répartition des subventions afférentes aux indemnités versées par les caisses dès le premier semestre de 1906 (Bulletin de l'Office du travail, février 1907, p. 133).

A. TOME XXIII. 1908.

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1907. Dans la résolution adoptée se trouvait un paragraphe ainsi conçu « Pour remplacer l'affichage du texte in extenso et pour permettre aux chefs d'établissement et aux personnes protégées par les lois visées de connaître leurs droits et obligations, l'État éditera ou fera éditer une brochure contenant le texte in extenso des lois et décrets dont l'affichage est prescrit.... » La question de la marque syndicale à apposer sur cette brochure a provoqué de vives discussions, qui se sont terminées par l'adoption du vœu suivant : « La brochure ne pourra être imprimée que par des maisons ayant le droit d'apposer la marque syndicale de la Fédération du livre sur leurs travaux ».

Puis le Conseil a émis un certain nombre de vœux relatifs à la protection du salaire en cas de faillite ou de déconfiture. D'autre part, il a invité le Gouvernement à rechercher les moyens de faire représenter l'agriculture au Conseil supérieur du travail. Surtout il a examiné la question de la capacité commerciale des syndicats professionnels.

Proposée en 1899 dans un projet de loi émanant du cabinet Waldeck-Rousseau, puis reprise à titre personnel par un de ses anciens membres, M. Millerand, en 1902 et en 1906, « rapportée » ainsi que d'autres propositions de modifications à la loi du 21 mars 1884, par M. Barthou à la fin de 1903, l'attribution aux syndicats professionnels de la capacité de faire des opérations industrielles et commerciales a été l'objet d'une longue discussion devant le Conseil supérieur. Elle n'avait pas été étudiée d'une façon complète par sa Commission permanente: en effet, les membres patrons ayant refusé d'aborder la discussion si elle ne portait pas sur l'ensemble de la loi de 1884 (comme, par exemple, le rapport de M. Barthou), deux rapporteurs ouvriers, MM. Keufer et Coupat, furent désignés pour rédiger conjointement une note dans laquelle ils se bornèrent à présenter le point de vue ouvrier en cette matière, laissant aux membres patrons la liberté de présenter leurs propres observations au Conseil supérieur.

Il convient de rappeler, avant tout, le sens des dispositions proposées par M. Millerand (et auxquelles s'est, en somme, rallié M. Barthou) relativement à la capacité commerciale des syndicats. Les syndicats, y voit-on, pourront faire des actes de commerce en se conformant aux dispositions ci-après : « Les syndicats de plus de sept. membres qui, dans le but d'exploiter une entreprise commerciale, formeront une société à responsabilité limitée, régie par les lois du

24 juillet 1867 et du 1er août 1893, bénéficieront des exceptions suivantes aux dispositions des dites lois » : le syndicat pourra être propriétaire de la totalité des actions; « dans ce cas, les syndiqués auront le droit d'être administrateurs sans être individuellement porteurs de parts ou actionnaires »; le capital pourra être divisé en actions ou coupures d'actions de 25 francs, etc.

Contre ces dispositions les deux rapporteurs ont présenté, en raccourci, les objections qu'antérieurement une très forte majorité des syndicats ouvriers avaient déjà formulées. Le syndicat ouvrier, déclarent-ils, a bien autre chose à faire que de s'occuper du commerce; qu'il accomplisse d'abord la tâche immense que lui a assignée la loi du 21 mars 1884 : la défense, non seulement des intérêts directs de ses membres, mais aussi des intérêts généraux de la corporation, sans parler de ceux du prolétariat tout entier. Au lieu de bénéficier à tous le syndicat commerçant ne profiterait qu'à quelques-uns; ses membres les plus actifs et la plus grosse partie de ses ressources seraient employés à des opérations souvent hasardeuses qui le détourneraient de son but essentiel; son existence même pourrait être compromise; en tout état de cause il deviendrait l'instrument d'« un misérable mercantilisme ». D'ailleurs il y aurait, au sein des organisations syndicales, « dualisme entre les partisans de l'action syndicale pure, exclusive, et les partisans de l'action commerciale, industrielle »; de là des discussions, des ruptures et un véritable émiettement des forces ouvrières. Sans doute la loi projetée n'oblige pas les syndicats à faire du commerce; elle se borne à leur donner une liberté nouvelle en leur fournissant des facilités pour en faire usage; mais ce serait là une liberté dangereure. Cette liberté, estelle seulement utile? « Si des travailleurs résolus et capables veulent entreprendre des opérations commerciales ou industrielles, rien ne les empêche d'organiser des sociétés coopératives de production. Les lois du 24 juillet 1867 et du 1er août 1893 leur en donnent la facilité, et l'État favorise par des subventions le développement des associations ouvrières. Une nouvelle expérience se produit dans ce sens.... Cette expérience doit se faire, non pas dans le syndicat, mais à côté, en dehors ou parallèlement. La confusion serait néfaste aux deux institutions, et principalement aux syndicats, dont le rôle est primordial il vise l'ensemble des intérêts économiques du prolétariat. »

Quelle a été, durant la session du Conseil supérieur, l'attitude des membres patrons sur cette question, nous ne le savons pas au

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