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Chagas, qui «< connaît déjà par une amère expérience, tous les vaisseaux de guerre portugais; », le docteur d'Almeida, quelques autres encore... Machado est resté aussi étranger au complot qui se tramait dans l'ombre que cet autre vétéran, le philosophe et historien Théophile Braga : « L'idéal de notre parti, déclare ce dernier à un journaliste espagnol, est la révolution du Brésil... La mort du roi a été une surprise pour tous... L'idée pacifique républicaine finira d'elle-même par triompher... Notre parti, tout en étant capable d'héroïsme et ne reculant pas devant la force, comme ultima ratio, lui préfère la révolution des idées qui retarde peut-être la conquête du pouvoir, mais qui gagne sûrement et rapidement les consciences ... ».

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Tout le monde, dans le parti, ne partage pas cette dernière opinion. Les républicains fussent-ils plus d'accord qu'ils ne le paraissent sur leur tactique et leurs moyens d'action, qu'il leur faudrait démontrer à l'étranger, qui hésite à croire que le chaos monarchique n'ait pas d'autre issue, que « le changement d'étiquette modifiera vraiment la nature du liquide », selon le mot de M. Finot et aussi que le pays est mûr pour la liberté démocratique...

Tout espoir ne semble donc pas perdu pour la monarchie portugaise. Mais il est grand temps qu'elle groupe ses forces et qu'elle aille d'elle-même au-devant des réformes. Ce n'est pas seulement l'éducation du peuple, c'est aussi l'éducation politique des partis dynastiques qui est à faire. Il est malheureusement à craindre que la coalition monarchiste actuelle ne change pas grand'chose à la situation créée par le système « rotatif ». Si les régénérateurs et les progressistes gouvernent, pour un temps, ensemble, au lieu de se combattre, toute la question est de savoir s'ils vont gouverner autrement. « Une heure d'attendrissement autour du cerceuil du roi et de la jeunesse de son successeur ne garantit pas encore qu'ils aient dépouillé le vieil homme, d'autant que les habitudes de leurs clientèles ne leur rendent pas facile de le faire 2. »

L'avenir du Portugal apparaît, en somme, sous un jour bien incertain, et toutes les surprises sont possibles. Mais, quelles que

1. Déclaration au correspondant de l'Imparcial de Madrid (17 janvier 1908). 2. Les Débats, 24 février 1908.

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soient les tempêtes qui viennent encore assiéger et bouleverser sa vie politique, le monde civilisé doit se garder de les envisager avec mépris il convient d'y voir surtout, en effet, les efforts d'un peuple qui se souvient encore de son glorieux passé purifier du vieux et honteux système des partis, pour se régénérer véritablement et prendre une part plus directe et plus active à ses destinées.

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ANGEL MARVaud.

LE SOCIALISME

ET LE MOUVEMENT OUVRIER EN ALLEMAGNE

L'Allemagne est, à l'heure actuelle, le pays de l'Europe dans lequel la tendance naturelle de la classe ouvrière à réclamer des améliorations économiques a pris le développement le plus considérable; et c'est surtout en Allemagne que cette tendance s'est précisée et organisée en un « socialisme », c'est-à-dire en un vaste mouvement de revendications, avec des chefs, une hiérarchie, une discipline, une propagande méthodique.

Pour quelles raisons un socialisme si puissamment organisé s'est-il ainsi développé en Allemagne? Suivant nous, pour deux principales raisons. Les Allemands modernes ont un goût prononcé pour les recherches scientifiques, aussi bien au point de vue sociologique qu'au point de vue des sciences abstraites et naturelles; en Allemagne, les questions les plus pratiques et les plus courantes se transforment fréquemment en objets d'études scientifiques : les rapports économiques et sociaux entre les diverses classes de la nation ne devaient pas échapper à cette tendance. L'Allemand a de plus une disposition naturelle à fonder des associations, à organiser des groupements; tandis que le Latin a plutôt une formation d'esprit individualiste, le Germain a plutôt une formation d'esprit associationniste l'ouvrier allemand est donc porté, pour discuter et pour lutter, à former des groupes, des vereine, et son esprit formaliste, assez fonctionnariste », le pousse à donner à ces groupes une organisation très serrée, très méthodique.

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Le socialisme allemand a, pendant une vingtaine d'années, exercé une sorte d'hégémonie sur le monde ouvrier européen si cette hégémonie est aujourd'hui un peu sapée par des éléments plus audacieux qui se sont formés notamment dans les pays latins, l’in

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fluence exercée par le socialisme de l'Allemagne sur celui des autres pays reste considérable.

Le mouvement ouvrier allemand se partage en deux vastes organisations le parti socialdémocrate, qui est une organisation à forme et à tendance politiques, et le syndicalisme, qui est une organisation économique.

I

Examinons brièvement comment s'est constitué le parti socialdémocrate.

La première grande association ouvrière allemande est celle que Lassalle organisa en 1863, l'Association générale des ouvriers allemands. Après la mort de Lassalle, des dissensions se produisirent au sein de l'association le socialisme de Lassalle était une sorte de socialisme d'état, de socialisme nationaliste: Marx, Engels, Liebknecht, imbus d'un esprit révolutionnaire et internationaliste, se séparèrent de l'association. Tandis que Marx fondait, en 1868, l'Association internationale des Travailleurs, Liebknecht et Auguste Bebel fondaient, en 1869, au congrès d'Eisenach, le Parti ouvrier socialdémocrate, qui se réclamait des doctrines de Marx.

La rivalité entre Lassalliens et Marxistes continua pendant plusieurs années; puis une fusion s'opéra entre les deux partis, en 1875, au congrès de Gotha ce fut en réalité une victoire des Marxistes et une sorte d'absorption des Lassalliens par le parti socialdémocrate.

Bismark ayant fait voter en 1878 par le Reichstag la fameuse loi d'exception connue sous le nom de « loi des socialistes », le parti socialdémocrate subit un recul passager; mais la persécution exalta l'esprit de dévouement à la « cause » chez beaucoup d'ouvriers, et en 1890, quand la loi d'exception vint à expiration, le parti prit un essor considérable.

Il s'organisa et détermina son programme aux congrès de Halle (1890) et d'Erfurt (1891). Les décisions du congrès d'Erfurt forment en quelque sorte la grande charte du parti; certaines idées lassalliennes sont définitivement abandonnées au profit des idées marxistes d'autre part, les camarades à tendance anarchiste, les

<< Jeunes », qui avaient voulu lutter contre la direction des Bebel, des Auer, etc., sont obligés de quitter le parti.

Dès 1891, nous voyons apparaître un personnage intéressant, M. de Vollmar; c'est un ancien officier, resté estropié depuis la guerre de 1870, bien éduqué, à tendances catholiques, un « rassasié », disent ses rivaux, très influent à l'heure actuelle en Bavière. Vollmar exposa sa conception d'un socialisme réformiste et non révolutionnaire, attendant tout du temps et de l'évolution sociale progressive: il demandait qu'on poursuivit des réformes partielles, prochainement réalisables, et non point une transformation utopique ou catastrophique de la société. Bebel, à Erfurt, répondit vigoureusement à Vollmar: il soutint que la modération de celui-ci conduirait le parti à la dégénérescence et refroidirait l'enthousiasme nécessaire pour obtenir le succès final.

La tendance réformiste et opportuniste, qui avait trouvé en Vollmar un orateur énergique, trouva un théoricien éclairé dans la personne d'Édouard Bernstein. Celui-ci s'attaqua non seulement à la tactique de Liebknecht et de Bebel, mais aux théories mêmes de Karl Marx. Ce fut surtout en 1899, au congrès de Hanovre, que le parti discuta les théories de Bernstein. On admit partiellement sa critique de la théorie marxiste sur la conception matérialiste de l'histoire, mais, sur les autres points, Bernstein n'eut autour de lui qu'une minorité la majorité ne manifesta aucune confiance dans le caractère socialiste que Bernstein reconnaissait aux syndicats, aux sociétés coopératives, aux lois de protection, d'assurance ouvrière, et maintint énergiquement le dogme de la conquête des pouvoirs et de l'expropriation.

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Le mouvement réformiste dont Bernstein est le chef, n'a pas abouti à un schisme dans le parti. Fait digne d'attention, car il est caractéristique de la forme disciplinée de l'esprit allemand. D'une part, il y a eu blâme des idées de Bernstein, notamment à Lübeck, en 1901, mais il n'a pas été exclu du parti d'autre part, chez Bernstein, il y a eu protestation contre la motion de Lübeck, mais il n'y a pas eu révolte ouverte.

Ces divergences doctrinales ou pratiques n'ont pas empêché la socialdémocratie de faire des progrès considérables. Le chiffre de s voix obtenues par les candidats du parti au Reichstag est significatif :

« EdellinenJatka »