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dans nos départements, qu'elle était à Paris, dans ces usines qui fabriquaient à votre usage des vins de toutes pièces ».

La C. G. V. ne comprend pas que des orateurs; elle a aussi des diplomates, des hommes d'état. Dans la conférence permanente que préside M. Cazeaux-Cazalet et où toutes les grandes sociétés agricoles de France sont représentées, la C. G. V. plaide utilement sa cause.

Autour du tapis vert, la vigne et la betterave, le Midi et le Nord se sont rencontrés, on ne s'est pas entendu. Trop large est le fossé qui sépare les antagonistes. Mais on a causé. C'est quelque chose.

Dissiper les préjugés défavorables au Midi, lui créer en tous lieux des amis et des clients, c'est, en effet, la pensée constante de la C. G. V., celle qu'on retrouve dans tous ses actes.

Elle veut, sous les apparences, saisir les réalités. Partout où pourrait s'embusquer la fraude, ses investigations pénètrent. Elle a une commission des alcools, une commission des sucres. En même temps que ses légistes et ses économistes étudient l'épineuse question de l'acquit à caution, qui sert si souvent à dissimuler les mouvements de la marchandise, les chimistes de son Comité technique s'adonnent à des recherches touchant l'usage de l'acide tartrique, l'emploi des vins défectueux, la meilleure utilisation des lies; s'acharnent à la découverte du révélateur idéal, celui « qui serait introduit dans tous les sucres et qu'on retrouverait infailliblement dans les vins si on en avait fait usage », le révélateur inoffensif, peu coûteux, sans goût, doué de tant de vertus qu'il évoque, hélas, l'idée de la pierre philosophale.

Enfin la C. G. V. est une puissance sociale. Elle ne peut pas ne pas l'être. Faite d'éléments hétérogènes, sinon hostiles les uns aux autres, il y va de son existence qu'elle supprime les causes de heurt internes, concilie les intérêts rivaux des différents groupes sous sa bannière. Elle comprend des patrons ou des ouvriers; elle fera donc entre eux fonction de médiatrice, voire de tribunal des conflits. La C. G. V. est, ou paraît en voie de devenir quelque chose de plus, qu'annonce sa dernière et plus personnelle création le label confédéral.

Le label confédéral c'est, ou plutôt ce sera, pour emprunter la définition de Vendémiaire, « une marque ou empreinte », apposée

moyennant certaines conditions sur les locaux ou les récipients ne contenant que des vins naturels, une signature de la C. G. V. qui voudra dire « que le vin qu'elle revêt a toutes les chances possibles d'être du vin » et non point même du vin quelconque, mais un vin de provenance déterminée. Le label sera le certificat d'origine, datant d'un état civil, qui trop longtemps leur manqua, les produits languedociens; la garantie d'authenticité par quoi ils seront réhabilités d'un injuste décri.

L'arbre se juge aux fruits, l'œuvre aux résultats. L'une est trop jeune pour que les autres soient décisifs et ils ne sont qu'encourageants la fraude non pas vaincue mais enrayée; les cours remontés non point à un niveau normal' mais en dépit d'une récolte de plus de 66 millions d'hectolitres maintenus à un étiage qui permet la patience, voilà « les plus palpables » sinon les plus précieux effets de cette action diverse et convergente.

2

·

<< L'heure est aux actes » déclarait le 9 juin, en jetant son écharpe à la foule, un des chefs du Midi.

Le Midi ne s'est point menti à lui-même. Il agit; «< il ne cesse plus d'agir ». La nouvelle surprendra bien des gens à qui l'on persuada que lorsque le Midi ne parle pas, il ne pense pas, ni ne vit presque; qui s'imaginaient qu'avec le dernier écho du dernier discours ou du dernier coup de fusil, tout était bien fini là-bas, et que les gazelles parisiennes se taisant, l'incident était clos.

Excusable méprise. Depuis le jour où il s'est levé à la voix de Marcellin Albert, le Midi nous a causé tant d'étonnements!

Celui-ci cependant est le plus fort.

J'ai écrit tout à l'heure le mot « réforme ». Le mot n'est pas trop fort. Cette crise a été le point de départ d'une réforme morale chez ceux qu'elle éprouva. Le malheur a été leur maître. A ce peuple léger, brillant, insouciant, incohérent, voué aux apparences, dupe des sonorités. il a appris la persévérance, la discipline, la valeur de l'union, le sens de la responsabilité, et ce qui semble le moins capable de s'enseigner « l'initiative ». Il l'a remis debout. Le Midi vacille encore, il fera encore sans doute

plus d'un faux pas.

1. Le relèvement des cours est sensible à Paris où un litre de vin ne se vend

pas au-dessous de 0 fr. 25.

2. Algérie non comprise.

Mais du fait seul qu'il marche, l'événement dépasse la portée d'une leçon particulière, d'une expérience régionale.

Il rayonnera bien au delà des limites des Provinces-Unies, pour leur défense. Dans une France déshabituée de compter sur ellemême, il hausse le Midi au rôle de professeur d'énergie nationale, lui permet d'inscrire sur des bannières visibles de très loin, la devise d'une jeune nation qui prétendait devoir moins à la protection d'une puissante voisine qu'à son propre courage: Fara da se.

PAUL HAMElle.

L'AUTRICHE NOUVELLE

SENTIMENTS NATIONAUX ET PREOCCUPATIONS SOCIALES

(Suite et fin 1).

II

L'étude des élections, faites en Autriche pour la première fois en 1907 par le suffrage universel, révèle des préoccupations sociales et économiques très marquées; elle montre une évolution des influences sociales en Autriche. Ce fait capital ressort clairement de la transformation subie par les partis politiques : les éléments aristocratiques de la Chambre s'affaiblissent et disparaissent presque; les vieux partis bourgeois sont en décroissance; des fractions démocrates radicales apparaissent, sans prendre du reste de l'importance; partout se sont constitués des partis agrariens, qui triomphent dans les campagnes; enfin deux partis populaires prennent une extension considérable ce sont les socialistes et les chrétiens-sociaux.

Jusqu'en 1907, l'aristocratie et les grands propriétaires de terres. nobles faisaient sentir leur influence à la Chambre des députés par l'intermédiaire des 85 représentants de leur curie. Si chez les Polonais et les Tchèques dominait la vieille noblesse fédéraliste, qui soutenait des idées religieuses et conservatrices, il n'en était pas de même chez les Allemands une dizaine de députés du Tirol, de Moravie et de Haute-Autriche s'unissaient bien au parti catholique conservateur; mais la plus grande partie, une trentaine environ, constituaient le groupe des grands propriétaires constitutionnels, d'idées libérales, de tendances centralistes et se défiant des influences religieuses si certains d'entre eux étaient des aristocrates, la plupart appartenaient à la noblesse récente de fonctionnaires, et quelques-uns 1. Voir les Annales du 15 mai 1908.

étaient même simplement de riches bourgeois acquéreurs de terres nobles.

Dans une série d'articles publiés avant les élections par un professeur à l'Université de Vienne, M. de Weiser, celui-ci se demandait si le régime des curies n'avait pas fait des grands propriétaires une sorte de «< plante de pot », ayant perdu tout contact avec le sol populaire, et qui, replantée en pleine terre, serait impuissante à y pousser ses racines; il exprimait le désir qu'on fit une place à la noblesse dans les nouveaux partis, pour que son influence ne fut pas exposée à se faire sentir seulement au dehors du parlement << en résistance » ; mais il terminait en se demandant: est-ce possible1?

Chez les Allemands, 14 ou 15 grands propriétaires ont fait acte de candidats; deux seulement, le comte Alfred Khevenhüller, en Carinthie où il était député de la grande propriété, et l'ancien ministre, comte Bylandt-Rheidt, en Basse-Autriche, se sont présentés comme chrétiens-sociaux et du reste ont été écartés; tous les autres ont pris position en qualité d'agrariens libéraux et ont été combattus ici par des conservateurs catholiques, comme en Styrie, là par des chrétiens sociaux, comme au Tirol et en Carniole, là enfin par des agrariens démocrates ou des socialistes, comme en Bohême et en Silésie. Leur échec fut grand 2; 3 seulement réussissent à être élus, le comte Léopold Kolowrat et le Docteur Damm, en Bohême, et le prince Charles Auerperg dans son fief de Gottschee, où il ne triompha de son adversaire chrétien-social que par 2000 voix contre un millier.

Cet insuccès est d'autant plus notable que les grands propriétaires. se présentaient dans les pays où ils avaient leurs terres, avec un programme habile emprunté aux partis agraires et avec l'appui ou la neutralité des groupes allemands libéraux. Ils ont partagé la défaveur de ces derniers, accentuée encore par la poussée démocratique en Autriche.

La grande aristocratie tchèque, qui jusqu'au dernier jour s'est posée en adversaire du suffrage universel, parait avoir « boudé » les

4. Professeur Frédéric baron de Weiser, Neue Freie Presse, 19 septembre 1906, morgenblatt.

2. En Bohème le C François Deym, le D' Baernreither, le C Buquoy ont été battus par des agrariens démocrates et par des socialistes; en Styrie, le Ct Stürghl le Bro de Kellersberg et le Bro de Moscon par des conservateurs catholiques; en Silésie, le C Hans Larisch, par un socialiste; au Tirol, M. Grabmayr, par un chrétien-social.

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