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peut tabler le pays. L'ouvrage de M. Koebel peut servir de complément au précédent : c'est le récit pittoresque, à côté de l'exposé documentaire. Il montre ce qu'est la vie à Buenos-Ayres, la gigantesque capitale de ce jeune pays; au Campo, la source des richesses de l'Argentine; l'exploitation d'une estancia. La connaissance de ces pays neufs devient de plus en plus nécessaire aux économistes et aux hommes d'État : ce sont des éléments nouveaux dans la vie internationale, avec lesquels il faut s'habituer à compter. A. F.

C. Colson, ingénieur en chef des ponts et chaussées, conseiller d'État. Cours d'économie politique; livre VI : les travaux publics et les transports. Paris, Félix Alcan, 1 vol. gr. in-8°, 527 p.

Ce volume vient compléter le Cours d'économie politique dont M. Colson, professeur à l'École des ponts et chaussées et à l'École des sciences politiques, a entrepris la publication depuis plusieurs années. Le même accueil lui est réservé qu'aux cinq volumes précédents, devenus classiques presque dès leur publication. Il est impossible d'analyser et de rendre compte avec détail d'un ouvrage aussi considérable. On ne peut qu'appeler l'attention sur l'intérêt particulier qu'il offre, et en indiquer les grandes divisions. Ce traité offre cette particularité intéressante d'être écrit par un homme qui, dans des fonctions publiques actives élevées, a été mêlé de près aux questions pratiques: la vie économique lui est familière; il a eu à lutter avec la réalité des faits. De là résulte dans l'examen des questions économiques, si complexes, un tour d'esprit caractéristique: le professeur de carrière est nécessairement porté à l'abstraction; malgré ses efforts sincères, il est une ambiance des faits qu'il ne parvient souvent pas à reconstituer, et il négligera dans ses généralisations des phénomènes d'apparence secondaire ou négligeables pour lui, et qui cependant prennent avec raison aux yeux du praticien une importance réelle. C'est cet esprit qui donne un intérêt tout particulier à l'œuvre de M. Colson.

L'ouvrage se partage en trois grandes divisions. Dans la première (livre I), l'auteur fait à grands traits l'exposé général et théorique des phénomènes économiques. C'est comme une grande introduction à l'étude détaillée qui va suivre, de ces phénomènes. Dans ce livre, il pose les principes généraux dont il fera l'application dans les suivants. Les trois autres livres ont pour objet le livre II, le travail et les questions ouvrières; le livre III, la propriété des capitaux, des agents naturels et des biens incorporels; le livre IV, les entreprises, le commerce et la circulation. Les deux derniers livres sont consacrés à des sujets plus spéciaux : l'un, le livre V, traite des finances publiques; l'autre, le livre VI, qui vient de paraitre, des travaux publics et des transports. Ce dernier offre peut-être un intérêt plus grand encore que les autres, par la compétence toute spéciale de l'auteur en ces importantes questions.

L'auteur ne se rattache par ses origines, ainsi qu'il le fait lui-même remarquer, à aucune École particulière. N'est-il pas d'autant plus intéressant de voir, à une époque où les économistes de la chaire acceptent de plus en plus l'extension du principe de l'intervention de l'État, un homme dont l'esprit a été façonné par la pratique des affaires montrer une réelle répugnance pour une solution qui tend presque à s'imposer comme une panacée. Si générale que soit cette tendance à l'intervention de l'Etat], écrit notamment M. Colson, réagir contre elle est aujourd'hui d'un intérêt capital pour tout l'avenir de la civilisation. »

A. VIALLATE.

Pierre Clerget. La Suisse au XXe siècle. Étude économique et sociale. 1 vol. in-12. A. Colin, édit.

Depuis quelques années la France, dont il a été de mode si longtemps de railler l'indifférence pour les questions étrangères et l'incuriosité à l'égard des pays situés au delà de ses frontières, fournit des études de plus en plus nombreuses et remarquables sur l'état économique, social, politique des divers pays. Les peuples les plus étudiés ont été jusqu'ici ceux dont les progrès paraissent les plus significatifs ou les plus menaçants pour nous : l'Angleterre et ses colonies, les États-Unis, l'Allemagne, quelques républiques sud-américaines.

Les contrées secondaires de l'Europe n'ont pas encore été souvent traitées. C'est un tort, et il faut savoir beaucoup de gré à M. P. C. de l'avoir compris. Dans son excellent petit livre il passe en revue un des pays de l'Europe dont l'histoire, les efforts, les progrès sont un des exemples les plus remarquables de ce que peut accomplir un peuple qui possède à un haut degré ces vertus civiques par excellence qui sont l'amour de la liberté, le respect des lois, la discipline sociale, le patriotisme, l'ardeur au travail. Toutes ces qualités, le peuple suisse les a portées à leur maximum, et le résultat est une prospérité matérielle admirable, l'instruction répandue dans les couches les plus infimes de la population, d'innombrables œuvres d'assistance, et une éducation supérieure de la démocratie.

Ce sont des exemples qui valent bien la richesse et la splendeur de la civilisation des grands peuples voisins, richesse et splendeur qui ne vont pas sans être accompagnées de grandes misères sociales et morales. Il y a beaucoup à apprendre pour nous chez ces petits peuples, Suisses, Hollandais, Scandinaves. Le jour où nous aurons surpris et appliqué le secret de leur prospérité et de leur tranquillité, qui réside, au fond, dans la santé vigoureuse de leur corps politique, dans l'harmonie complète des hommes et des institutions avec les besoins de la société, la France sera sauvée.

II.-R. S.

Léon Poinsard.

La production, le travail et le problème social dans tous les pays au début du XXe siècle. Félix Alcan, 2 vol. in-8°, 593 et 768 p.

M. Poinsard avait publié, il y a une quinzaine d'années déjà, un ouvrage intitulé Libre-échange et protection, dans lequel il s'était proposé d'expliquer « la politique douanière de tous les pays par les circonstances de leur état social et économique ». Cet ouvrage avait eu un légitime succès; au lieu de le rééditer purement et simplement, en s'attachant à le mettre à jour, l'auteur a voulu amplifier ces premières études, et il a entrepris courageusement une tâche considérable : l'étude de la production, le travail et le problème social dans tous les pays au début du XXe siècle.

Il serait vain de tenter d'analyser un ouvrage de ce genre il mérite d'être étudié autant que lu. Adepte convaincu de la « science sociale », qui a pour auteur original Le Play, mais a été modifiée depuis lui et systématisée par des disciples, dont les plus connus sont Henri de Tourville et Demolins, la méthode de l'auteur n'est pas sans surprendre tout d'abord le lecteur qui n'a pas eu l'occasion de l'étudier. Certaines classifications le déroutent, des affirmations l'étonnent par leur netteté. Il aurait tort de se laisser rebuter par cet appareil scientifique. Qu'il l'adopte ou qu'il le rejette, il trouvera dans ces deux volumes une masse considérable de connaissances, réunies à grand'peine, et un grand nombre de réflexions judicieuses qui lui ouvriront sur les questions économiques de fort intéressants aperçus. A la fin de cette immense entreprise « dont l'étendue et les difficultés, nous dit l'auteur, l'ont plus d'une fois jeté dans le trouble et l'hésitation », il a rassemblé dans une conclusion générale les idées fondamentales qu'elle avait fait naitre dans son esprit, et comme la philosophie générale qu'elle l'a conduit à tirer relativement aux « conditions normales du progrès social». Il les résume ainsi : Le progrès social et le développement économique ne peuvent se produire d'une manière régulière et continue, que dans une société basée sur les principes suivants : large autonomie du particulier, stabilité de la famille, pratique assidue des travaux variés, étroite limitation des pouvoirs de l'autorité publique centrale. » L'on ne peut s'empêcher, devant ces conclusions, de regarder avec mélancolie le mouvement général qui paraît emporter nos sociétés occidentales vers une organisation toute différente de la vie.

A. V.

Henry Sage, docteur en droit. Les Institutions politiques du pays de Liége au XVIIIe siècle, leur décadence et leur dernier état, Paris, Arth. Rousseau, 1 vol. in-8. L'histoire du pays de Liége sous l'Ancien Régime offre le spectacle d'un état singulièrement respectueux des libertés civiles. Je ne crois pas que, sauf l'État anglais et avec plus de bonhomie, il en existait un autre en Europe qui entourât

de telles garanties les droits des citoyens. Dans le nouvel ouvrage que vient de nous donner M. H. S., il a voulu nous expliquer le mécanisme des institutions liégeoises, en analyser les organes au moment où leur désagrégation commençante permet davantage de saisir leur caractère essentiel, montrer comment l'état liégeois, sans constitution proprement dite, fut véritablement un état constitutionnel. Au sommet de la hiérarchie, le prince-évêque, souverain élu, sorte de président à vie dont les pouvoirs sont limités par les droits des États. Les États, comme nos États généraux, composés de trois ordres et comme eux temporaires. Ils se réunissent régulièrement deux fois l'an en session ordinaire de dix jours; le prince garde la faculté de les convoquer plus souvent. Ils votent l'impôt et en surveillent l'emploi; une délégation permanente, analogue à celle qui fonctionne chez nous dans l'intervalle des sessions des Conseils généraux, contrôle l'utilisation des fonds. L'évêché de Liége jouit donc du bienfait d'un budget régulièrement voté. Pour les actes que le prince peut accomplir sans le consentement des États, les édits de police générale, par exemple, la règle de l'irresponsabilité du souverain se concilie avec des sanctions effectives. Chacun des actes du prince doit être contresigné par un membre du conseil privé, sorte de conseil des ministres. Et pour que la responsabilité de ces fonctionnaires soit réelle, ils ne sont pas seulement passibles de destitution, mais responsables sur leurs propres biens. Le droit de grâce, qui pourrait les soustraire au châtiment, n'appartient pas à l'évêque trop aisément tenté de le faire servir à innocenter des serviteurs coupables simplement d'avoir exécuté ses ordres : il est la propriété des États. A côté des États, garantie de saine gestion financière et de bonne administration, le tribunal des XXII, garantie de prompte et sévère justice; l'institution, peut être la plus originale du pays de Liége, sorte de jury permanent que chacun peut saisir et qui peut se saisir lui-même directement des causes d'intérêt public. Désignés pour un an, ses membres étaient responsables devant leurs successeurs des abus qu'ils avaient pu commettre dans l'exercice de leur charge.

Tel se présente en bref le régime dont M. II. S., dans une étude effectuée sur les documents originaux, pénétrante et claire, nous a retracé la décadence depuis le coup d'état épiscopal de 1684 qui en restreignit les libertés jusqu'à la révolution du 18 août 1689 montrant comment cette organisation ecclésiastique se décompose peu à peu au contact des idées nouvelles. Comme ouvrage de droit constitutionnel, l'ouvrage de M. H. S, n'est pas indigne d'être rapproché des livres d'Émile Boutmy et c'est dire quelle utilité il présente au point de vue de la formation et du fonctionnement des institutions libres en Europe. Dans un chapitre spécial, fort instructif au point de vue du droit international, M. S. étudie la neutralité du pays de Liége, neutralité bien particulière faite d'une servitude de passage librement consentie par l'évêque pour se maintenir en dehors des hostilités. Le long couloir formé par l'État liégeois dans la vallée de la Meuse est

comme un détroit qui assure les communications de l'Allemagne et de la France; une sorte de Sund territorial dont le souverain contrôle la traversée. Il n'est pas comme la Belgique actuelle une région dont la possession donnerait la prépondérance en Europe occidentale à détenteurs. Loin de l'interdire, le prince, au contraire, accepte la violation de son territoire pour assurer son intégrité. On voit la différence de la neutralité liégeoise avec les neutralités permanentes et actuelles et comment il serait imprudent de l'y rattacher : elle se réfère à d'autres principes. Paix à l'extérieur, paix à l'intérieur. M. S. a nettement montré comment le pays de Liége se maintint depuis les époques les plus lointaines dans la traditlon d'un libéralisme conciliant qui sut, au temps de la Réforme, éviter les bûchers, accueillir les Encyclopédistes au XVIIe siècle, offrir une chaire à Sainte-Beuve sous le second Empire et qui reste le caractère distinctif de la Wallonie.

R. DOLLOT.

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E. Tonnelat. L'expansion allemande hors d'Europe. Lib. Armand Colin; 1 vol. in-18, 278 p.

Dans son intéressant ouvrage sur L'émigration européenne au XIXe siècle, M. R. Gonnard avait, naturellement, consacré un chapitre à l'émigration allemande. M. Tonnelat a pu visiter, sinon toutes, du moins les plus importantes des colonies allemandes hors d'Europe. Son ouvrage nous apporte donc, sur ce sujet d'une réelle importance, une documentation et des impressions précieuses. Ses chapitres sur les Allemands aux ÉtatsUnis; les colonies allemandes au Brésil; les Allemands au Chantoung, ces deux derniers surtout, sont particulièrement intéressants. L'étude sur les Allemands et indigènes dans l'Afrique du Sud complète cet ensemble d'essais traitant à la fois de l'émigration et de la colonisation allemandes.

Les colonies allemandes au Brésil ont appelé l'attention ces dernières années, et même soulevé quelques appréhensions de la part des États-Unis. Les conclusions de M. T. à ce sujet prouvent leur futilité: « Quant à la fondation d'un Etat indépendant de paysans allemands dans le sud du Brésil, dit-il, elle parait encore moins vraisemblable qu'un essai d'annexion territoriale par l'Allemagne. »

V. A.

Georges Blondel.

L'éducation économique du peuple allemand. Larose et Tercin, 1 vol. in-18, 136 p.

La grande connaissance qu'a M. Blondel des questions économiques en général, et en particulier de celles qui concernent l'Allemagne, donnent un intérêt particulier à cette nouvelle étude, résultat d'observations faites au cours de plusieurs voyages. L'occasion particulière de celle-ci est l'inauguration, l'année dernière, de la nouvelle école des hautes études commer

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