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tique, nous devons dire toutefois que nous n'en connaissons pas encore d'exemple.

Quelles sont les conditions de validité de l'hypothèque à Madagascar? L'article 128 du décret copie ainsi qu'il suit l'article 2 129 du Code Civil. « Il n'y a d'hypothèque conventionnelle valable et par conséquent pouvant être inscrite que celle qui, soit dans le titre constitutif de la créance, soit dans un titre postérieur déclare spécialement la nature et la situation de chacun des immeubles actuellement appartenant au débiteur sur lequel il consent l'hypothèque de la créance. >>

On remarquera que cet article est la copie littérale de l'article 2 129 du Code Civil sauf que le Code parle du titre authentique constitutif ou d'un acte authentique postérieur.

Il semble bien résulter de la seule comparaison de ces deux textes que le décret n'exige pas un acte authentique pour la constitution d'hypothèque.

Toutefois la validité de l'hypothèque sous seing privé fut longtemps discutée. La jurisprudence, qui avait d'abord rejeté la validité de telles hypothèques 1, est fixée maintenant en sens contraire et admet la validité d'hypothèque sous seing privé.

Ayant participé nous-mêmes à ce changement de jurisprudence nous croyons devoir insister sur ce point.

Les partisans de la nécessité d'acte authentique pour constituer l'hypothèque invoquaient des arguments de la législation montrant la garantie apportée au contrat hypothécaire par la présence d'un notaire. Il était facile de leur répondre sur ce point, d'abord que l'esprit même du régime foncier de Madagascar est hostile au formalisme et que d'autre part on peut se demander en considérant les résultats si la protection des officiers ministériels est bien efficace, et si loin de dissuader l'emprunteur d'un contrat dangereux ils ne sont pas, en fait, les courtiers de capitalistes à la recherche de placements avantageux. Il faut ajouter qu'il n'existe pas à Madagascar de véritables notaires, que les greffiers des Tribunaux ou Justices de paix sont

1. Notamment ordonnance président Tribunal Tamatave du 9 août 1902 (Tribune des colonies, 1903, 1, 1929, 364).

Jugement Tribunal de Tananarive du 22 août 1904 (Tribune des colonies, 1905, 2148, 211).

chargés de ces fonctions, et que leur capacité professionnelle n'est pas toujours égale à leur bonne volonté.

D'autre part l'hypothèque sous seing privé est formellement reconnue par la législation de Tunisie, du Congo et du Dahomey et l'on comprendrait difficilement le motif d'une protection plus grande à l'égard des Malgaches que des autres peuples sujets.

Les adversaires de la validité de l'hypothèque sous seing privé invoquaient d'autre part des arguments de texte'. L'article 183 du décret parlant des actes translatifs des droits réels s'exprime ainsi : « Les signatures des parties apposées au bas des écrits autres que les actes authentiques ou judiciaires seront etc... >>

On concluait de ce texte, très arbitrairement selon nous, que les écrits dont il était parlé désignaient les contrats de vente, tandis que les mots actes authentique ou judiciaire désignaient les contrats constitutifs d'hypothèque ou les jugements ordonnant l'inscription d'hypothèque forcée. Nous avons jugé au contraire que la seule conclusion qu'on puisse tirer de ce texte et que la forme authentique des contrats de vente ou d'hypothèque n'est pas prohibée à Madagascar, qu'elle peut exister puisque la loi y fait allusion, ce qui n'est d'ailleurs pas contestable.

1. Décret du 16 juillet 1897, art. 183. « Tous faits ou conventions ayant pour effet de transmettre, déclarer, modifier ou éteindre un droit réel immobilier, d'en charger le titulaire ou de modifier toute autre condition de son inscription, tous baux d'immeubles excédant trois années, toute quittance de cession d'une somme équivalente à plus de trois années de loyer ou fermages non échus, seront, pour être opposables aux tiers, constatés par écrit et inscrits sur le titre par le Conservateur de la propriété foncière.

Les écrits indiqueront l'état civil des parties contractantes et mentionneront leur contrat de mariage, s'il en a été fait un, ainsi que la date de ce contrat, les noms et résidence de l'officier public qui l'a reçu. Ils seront, ainsi que toute décision judiciaire ayant le même effet, déposés soit en original, soit en expédition, à la Conservation de la propriété foncière. Ils seront conservés dans les archives et des copies, faisant foi de leur contenu et de la date du dépôt, pourront être délivrées à toutes époques aux intéressés.

Les signatures des parties, apposées au bas des écrits autres que les actes authentiques ou judiciaires, seront, avant le dépôt, légalisées suivant la forme ordinaire.

Si les parties ne savent ou ne peuvent signer, la reconnaissance de l'écrit aura lieu devant les autorités chargées de la légalisation des signatures, en présence de deux témoins sachant signer et ayant la capacité nécessaire pour contracter.

A défaut de légalisation, le Conservateur refusera l'inscription, si plusieurs originaux ou expéditions des pièces énumérées ci-dessus lui sont remises pour être inscrites, le Conservateur n'en conservera qu'une et devra remettre les autres aux intéressés, après y avoir mentionné que l'inscription a été effectuée.

D'autre part, on invoquait aussi l'article 108 du décret qui est ainsi conçu : «< L'hypothèque n'a lieu que « dans les cas et suivant les formes autorisés par la loi »; on prétendait que cette loi à laquelle renvoyait le décret ne pouvait être que le Code Civil et que par suite l'article 2 127 du Code Civil était applicable à Madagascar.

Cependant il y a lieu de remarquer que le terme de loi peut être appliqué au décret foncier de Madagascar, que ce terme dans sa généralité comprend tous les actes de législation ou de réglements; notamment le pouvoir législatif étant à Madagascar délégué au chef du pouvoir exécutif, les décrets y ont force de loi. Il est à remarquer aussi que le décret de 1897 ayant traité intégralement le régime. hypothécaire ne pouvait renvoyer au Code Civil. Enfin pour contester la validité de l'hypothèque sous seing privé on invoquait l'article 2 du décret. « Les dispositions du Code Civil qui ne sont contraires ni au présent décret ni au statut personnel des Malgaches s'appliquent aux immeubles immatriculés et aux droits réels sur ces immeubles. » Cet article 2 ne nous semble pas applicable au titre des hypothèques, on ne comprendrait pas pourquoi le législateur aurait copié presque tous les articles du titre des hypothèques, pour renvoyer au Code Civil, pour le seul article 2127. D'ailleurs le texte formellement contraire au Code Civil existe dans l'article 183 déjà cité.

C'est en raison de ces motifs que le 10 avril 1906 le Tribunal de Tananarive revenait sur l'ancienne jurisprudence et admettait la validité des hypothèques sous seing privé. La Cour de Tananarive, par arrêt du 1er août 1906, confirmait ce jugement, en adoptant ses motifs.

On admet donc maintenant comme indiscutable la validité des hypothèques sous seing privé; il est cependant regrettable qu'un point aussi important que celui de la forme à donner aux actes constitutifs d'hypothèque ait pu être mis en discussion, faute d'un texte suffisamment explicite.

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Au point de vue de l'expropriation le décret a cherché à réaliser une heureuse innovation. On critique depuis longtemps en France les lenteurs de la procédure d'expropriation hypothécaire, et les

frais exhorbitants qu'elle entraîne. Cette procédure est en rapport avec la législation foncière du Code Civil, mais ses lenteurs et ses frais auraient été en contradiction avec une législation foncière dérivée de l'Act Torrens et de la mobilisation de la propriété foncière. C'est pourquoi on appliqua au droit commun de Madagascar une procédure d'expropriation calquée sur celle dont jouit en France le Crédit Foncier en vertu du décret du 28 février 1852.

Le principe était bon, malheureusement le texte sur l'expropriation, trop sommaire, laissa des obscurités, d'autant plus nombreuses qu'un renvoi implicite du législateur au Code de Procédure civile laissait parfois les magistrats dans le doute sur le texte à appliquer. Les premières poursuites aux fins de vente immobilière furent annulées, il en résulta l'opinion imméritée que cette nouvelle procédure d'expropriation était plus compliquée que celle de la métropole. Nous croyons au contraire que c'est là un progrès sensible sur le régime métropolitain.

Le décret reconnaît au prêteur le droit de stipuler, soit dans l'acte d'emprunt, soit dans un acte postérieur, que faute de paiement à l'échéance il pourra faire vendre l'immeuble hypothéqué par-devant notaire. Cette clause doit être mentionnée sur le registre du Conser

vateur.

On a souvent critiqué en France l'article 742 du Code de Procédure civile qui oblige les parties à saisir le Tribunal pour les ventes immobilières. Le législateur de Madagascar s'est, à bon droit, montré plus libéral sur ce point en admettant que la vente sur saisie immobilière pourrait être faite par-devant notaire.

En vertu de quel titre peut être faite la saisie immobilière? On peut exproprier d'abord en vertu d'un titre exécutoire comme on le fait en France; on peut également poursuivre l'expropriation en vertu d'un acte sous-seing privé, pourvu toutefois que cet acte ait été inscrit sur le titre foncier 1.

Il eût été en effet sans intérêt d'autoriser les parties à contracter des hypothèques sous seing privé si le créancier n'avait pu poursuivre l'expropriation hypothécaire en vertu de ce titre non authen

1. Décret du 16 juillet 1897, art. 167: La vente des immeubles ne peut être poursuivie qu'en vertu d'un titre inscrit ou exécutoire pour une dette certaine et liquide ».

tique. Toutefois l'idée d'une exécution forcée en vertu d'un titre qui n'était pas revêtu de la formule exécutoire parut d'abord si surprenante que, malgré un texte formel, la jurisprudence ne voulut pas l'admettre.

« Attendu, disait un arrêt, qu'il apparaît à la Cour que l'article 167 sus-visé doit être entendu en ce sens que si l'on peut poursuivre l'expropriation d'un immeuble en vertu d'un titre inscrit c'est à la condition que ce titre contienne la formule exécutoire, qu'il ne saurait en être autrement puisque, en vertu de la règle générale portée dans l'article 545 du Code de Procédure civile à laquelle le décret du 16 juillet 1897 n'a nullement dérogé, nul jugement ni acte ne peut être mis à exécution s'il ne portent pas le même intitulé que les lois et ne sont pas terminés par un mandement aux officiers de justice, et qu'aux termes de l'article 551 du même Code il ne peut être procédé à aucune saisie immobilière qu'en vertu d'un titre exécutoire 1...

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C'était aller directement contre les termes formels du nouveau décret au profit des principes traditionnels du droit français.

En examinant la validité de l'hypothèque sous seing privé dans un jugement auquel nous avons fait allusion tout à l'heure, le Tribunal de Tananarive avait repris cette question.

<«< Attendu que s'appuyant sur un arrêt de la Cour qui déclare que l'exécution d'un immeuble ne peut avoir lieu qu'en vertu d'un titre inscrit et exécutoire. L... déclare que l'hypothèque sous seing privé n'aurait aucune valeur pratique.

<«< Mais que la jurisprudence de la Cour est sur ce point difficile à admettre, que l'article 167 a été transcrit de la loi foncière Tunisienne dans celle de Madagascar, qu'en Tunisie elle est le résultat de deux modifications successives (loi du 16 mai 1886 et loi du 15 mars 1892). « Qu'on ne saurait donc l'imputer à une inadvertance du législalateur 2. >>

L'arrêt de la Cour de 1906 qui confirma jugement du Tribunal admettant les hypothèques sous seing privé confirma également sa théorie sur ce point:

«Attendu que les appelants soutiennent qu'une hypothèque con

1. Arrêt de la Cour de Tananarive, 21 décembre 1902. 2. Jugement Tribunal de Tananarive, 10 avril 1906.

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