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concis et péremptoires de l'arrêt recueilli. D'abord elle était neuve; car à aucune époque et nulle part il n'y avait eu incident pareil avec décision sur cette question même, à part les analogies que nous allons signaler. De plus, elle était compliquée par les circonstances et considérations relevées dans le jugement et l'arrêt confirmatif qu'attaquait le pourvoi (Voy. J. cr., art. 8946, p. 355 et 359). C'est pourquoi nous avions traité cette question, avec celle d'où elle dérivait, dans une dissertation spéciale (loc. cit.).

Reproduisant les raisons qu'avaient données le jugement et l'arrêt, le rapport sur le pourvoi, pour les fortifier, a cité un arrêt de Belgique et une opinion de criminaliste sur une question plus ou moins analogue. Ces autres autorités vont faire l'objet de notre examen.

L'arrêt appartient à la Cour de cassation belge, qui l'a rendu le 25 mai 1818. Un accusé avait imaginé d'assigner en témoignage le président des assises; ce magistrat rendit une ordonnance portant qu'attendu qu'il n'a eu de relations avec l'accusé que lors de son interrogatoire, la citation n'est qu'un moyen d'entraver l'administration de la justice et est rejetée de la cause. Sur le pourvoi de l'accusé condamné, arrêt ainsi motivé: « Attendu qu'il est de principe qu'un accusé ne peut appeler comme témoin le juge que la loi lui assigne, sans des motifs graves et proposés d'avance;... que le réclamant a su longtemps d'avance que M. W... devait présider les assises; qu'il l'a cité le jour même de l'audience, sans énoncer le moindre fait ni motif; que le président a pu et dû, conformément à l'art. 270 C. inst. cr., user de son pouvoir discrétionnaire en rejetant la citation; qu'il ne peut être censé avoir été juge et partie, puisqu'il n'a décidé que de sa propre compétence de président dans une affaire où il n'avait aucun intérêt personnel. » Cette décision avait inspiré l'arrêt de la Cour de Montpellier, qui en appliquait la doctrine et certaines expressions à l'incident correctionnel: la cassation de cet arrêt prouve qu'il n'y avait pas analogie et raisons suffisantes.

L'opinion invoquée est celle de M. Nouguier (La Cour d'assises, t. 3). Cet auteur reconnaît bien qu'un juge peut être cité en témoignage, et qu'il existe une incompatibilité excluant l'exercice simultané des deux fonctions (nos 2116 et 2119). Mais il n'admet pas que la question de prépondérance doive se résoudre par la priorité, suivant l'opinion de M. Cubain adoptée en ces termes par M. Dalloz : « le magistrat qui a été investi des fonctions de membre de la Cour d'assises ne peut plus être cité comme témoin; et réciproquement le magistrat qui a été cité comme témoin ne peut plus être désigné comme membre de la Cour d'assises » (Rép. gen., v° Témoin, no 202). M. Nouguier n'admet pas non plus cette autre opinion de MM. Cubain et Dalloz, « que le magistrat même investi des fonctions de membre de la Cour d'assises, qui recevrait une citation en témoignage, ne pourrait sa faire juge de la régularité ou de l'irrégularité de la citation; qu'il devrait s'abstenir provisoirement, jusqu'à ce que l'obstacle résultant

de la citation fût levé par qui de droit » (Ibid., n° 203). Une autre distinction, avec des conséquences aussi différentes, est proposée par M. Nouguier, disant : « Ou la citation donnée au juge aura pour mobile un intérêt sérieux et vrai, ou elle sera inspirée par l'esprit de chicane et de fraude. Dans le premier cas, que le juge se retire et laisse carrière libre au témoin; dans le second cas, que la fraude soit déjouée comme elle l'a été à l'occasion de jurés appelés en témoignage; que le juge reste sur son siége et que son nom soit rayé de la liste des témoins (no 2123). Telle est la règle que je propose, et je le fais en la plaçant sous l'autorité de la Cour de cassation belge (n° 2134)... Si l'accusé avait pris des conclusions expresses au soutien de son exploit, s'il avait ainsi donné à l'incident un caractère contentieux, les pouvoirs du président auraient été insuffisants pour le vider, et la Cour d'assises aurait dû intervenir... C'est la Cour d'assises qui statuera. Mais comment se composera-t-elle, pour cela?... Il y a une différence essentielle entre une récusation franchement exercée et cette sorte de récusation indirecte, qui se masque sous une apparence mensongère. Dans le premier cas, le juge est réellement mis en cause par la récusation ; il est partie. Rien de semblable dans le second, où se débat simplement une question de capacité, d'attribution, de compétence. De pareilles questions restent toujours dans le domaine des juges dont les pouvoirs sont contestés. Ainsi c'est avec raison que la Cour de Belgique... » (n° 2125).

L'autorité du magistrat auteur et ses raisons, invoquées avec insistance dans la discussion qui a précédé l'arrêt de cassation ci-dessus, n'ont pu prévaloir contre celles qui se trouvaient dans notre dissertation précitée et contre les objections que nous allons résumer. D'abord il faut écarter l'argument emprunté à l'arrêt qui avait réputé nulle la citation en témoignage donnée par l'accusé à un grand nombre de jurés, lequel se fondait sur la constatation en fait « d'une manœuvre, d'un procédé aussi inouï que frauduleux » (Rej. 18 avr. 1861; J. cr., art. 7296); car ici la fraude était manifestée par le fait même, qui tendait à empêcher le jugement par les jurés de la session; et la décision émanait, sans concours d'aucun juré, de magistrats qui étaient personnellement et entièrement désintéressés dans l'incident à juger. Relativement à la question née de la citation que l'accusé donnait au président des assises, on doit remarquer que ce magistrat avait déjà commencé l'exercice de sa fonction par l'interrogatoire dans la maison de justice, que c'était seulement dans cet acte de ses fonctions qu'il avait connu l'accusé et l'affaire à juger, que la citation survenait le jour même de l'audience et avait manifestement pour but d'empêcher que le président continuât ses fonctions, qu'ainsi l'obstacle pouvait être levé par l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui comporte celui d'écarter toute entrave aux débats. Dans les deux cas, il y avait de la part de l'accusé une manœuvre prouvée par la situation même, ce qui excluait toute pensée d'exercice d'un droit, et la citation abusive pouvait être écartée

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sans qu'il y eût jugement par un juge intéressé. Reste l'opinion émise pour les cas où l'incident, né de la citation, serait à juger par la Cour d'assises elle-même. L'argument de M. Nouguier peut être puissant dans l'hypothèse posée, parce qu'alors encore il y a une fraude prouvée par le fait même de la citation en témoignage qu'un accusé fait donner au magistrat de la Cour d'assises constituée; et cependant l'opinion émise est contredite par d'autres criminalistes, se fondant sur le principe que nul ne peut être juge d'un procès ou incident dans lequel il se trouve personnellement engagé. Mais l'argument n'a plus de valeur et l'opinion qu'il fonde ne saurait plus s'appliquer, lorsqu'il s'agit de citation en témoignage, avant le jour de l'audience, qu'un prévenu pour sa défense fait donner à l'un des juges du tribunal, qui n'est pas constitué pour le jugement et qui pourra l'être sans le concours de ce magistrat. Ici, la présomption est pour l'exercice du droit de défense, qui peut avoir besoin d'une réponse à des interpellations, qu'il s'agisse de justification ou d'atténuation; les circonstances excluent toute présomption de fraude, tant qu'il n'y aura pas preuve d'emploi d'un moyen frauduleux pour écarter indûment tel juge. Cette preuve ne saurait être laissée à la discrétion du juge cité en témoignage, lorsqu'il est intéressé à une décision l'affranchissant des obligations du témoin régulièrement cité. Comme le disait M. l'avocat général Connelly, la dignité même de la magistrature sera moins blessée par une abstention, ainsi motivée que par la méconnaissance des conditions de justice qui sont la garantie des justiciables. Donc, en pareil cas, le magistrat ne peut concourir au jugement de l'incident, pour écarter la citation en témoignage et ensuite juger le fond; s'il le fait, la Cour saisie par appel doit annuler le jugement, sans quoi elle encourt ellemême la cassation avec renvoi devant une autre Cour: c'est démontré par la discussion et par l'arrêt de cassation.

Les erreurs commises ont produit des conséquences d'où naissent de nouvelles questions. Le concours illégal du juge cité en témoignage ayant déterminé le prévenu à se retirer pour faire appel, le jugement de condamnation rendu par défaut selon les témoignages produits par le plaignant a été frappé d'un appel ultérieur après sa signification, parce qu'une opposition aurait ramené les parties devant le même juge. La Cour impériale ayant maintenu le jugement par un arrêt immédiatement frappé d'un pourvoi suspensif, l'appel du jugement de défaut est resté sans solution : que devient-il? S'il eût été jugé, la cassation de l'arrêt sur incident aurait virtuellement anéanti le second, comme suite du premier, suivant le principe qu'un arrêt de cassation remet la cause et les parties au même état qu'avant la décision annulée. Ne l'ayant pas été, se trouve-t-il compris avec le premier dans le renvoi à la Cour substituée? Nous le croyons. Ainsi que l'ont dit Merlin (Rep., vo. Renvoi après cassation, p. 844) et Dalloz (Rép. gén., vo. Cassation, no 2152), « le principe est que tout tribunal qui, sur une affaire criminelle ou correctionnelle de sa compétence, a fait un acte ou rendu

un jugement que l'autorité supérieure a ensuite annulé, est irrévocablement dessaisi de cette affaire; et alors ni lui ni les magistrats qui lui sont subordonnés ne peuvent plus en connaître. Ce principe n'est pas écrit littéralement dans le Code d'instr. crim. de 1808; mais il résulte de plusieurs dispositions de ce code. Ainsi, aux termes de l'art. 214... 429, 431... » Par suite du dessaisissement irrévocable de la Cour d'appel et de tous juges du ressort, la Cour de renvoi lui est substituée pleinement, de telle sorte qu'elle doit juger et l'incident et le fond. L'incident comprend deux questions: 4° la citation au juge était-elle légale? 2o le concours du juge cité, au jugement annulant la citation, ne l'a-t-il pas vicié? L'annulation de ce jugement paraît inévitable; alors l'audition en témoignage serait de droit, à moins qu'elle ne fût jugée inutile. Mais il faudrait une évocation: serait-elle possible? Suivant l'interprétation donnée par la jurisprudence à l'art. 245 C. inst. cr. (Voy. notre dissertation, J. cr., art. 5674), le juge d'appel en matière correctionnelle doit nécessairement statuer sur le fond, toutes les fois qu'il annule pour vice de forme la décision du premier juge, ne fùt-elle que préparatoire ou interlocutoire. Or ici, le jugement sur incident avait même un caractère définitif, ainsi que le prouvent et la décision sur appel et la cassation de l'arrêt confirmatif. Y aurait-il quelque obstacle dans cette circonstance que l'appel, quant au fond, était porté à une Cour impériale autre que celle actuellement saisie? Nous ne saurions l'admettre, en présence d'un arrêt de cassation qui a irrévocablement dessaisi la première Cour et qui est attributif pour la Cour de renvoi.

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L'action en répression d'un crime commis par un mineur de seize ans, qui n'est justiciable que des tribunaux correctionnels et punissable que correctionnellement, se prescrit par trois ans comme pour les délits '.

ARRÊT (Min. publ. c. Hostein).

LA COUR ; Attendu que, suivant l'art. 1er C. pén., l'infraction que les lois punissent des peines correctionnelles est un délit, et que l'infraction punie d'une peine afflictive et infamante est un crime; que, d'après cette définition, la qualification de l'infraction dépend de la nature de la peine que la loi inflige à l'agent qui l'a commise; attendu qu'aux terines des art. 67 et 68 C. pén., l'individu âgé de moins de 16 ans qui n'aura pas de complices au-dessus de son âge, et qui sera prévenu de crimes autres que ceux que la loi punit de la peine de mort, de celle des travaux forcés à perpétuité, de la peine de la déportation, doit être traduit devant les tribunaux correctionnels, et ne peut être condamné, s'il est décidé qu'il a agi avec discernement, qu'à

1. Quoiqu'il y ait controverse parmi les auteurs, la jurisprudence se fixe dans ce sens. Voyez nos art. 2960, 7944 et 8825; adde rej. 9 déc. 1869 (infrà).

être enfermé dans une maison de correction pendant un temps déterminé par la loi; que cette mesure est éminemment correctionnelle; que, dans tous les cas, elle ne constitue pas une peine afflictive et infamante, et que, par conséquent, d'après la définition de l'art. 1or C. pén., l'infraction qui la rend applicable ne présente pas les caractères du crime; - attendu, dès lors, que ne peuvent lui être appliquées non plus les règles de la prescription édictées par l'art. 637 C. inst. cr., en matière de crime emportant une peine afflictive et infamante; - que l'infraction reprochée au mineur de 16 ans, en pareil cas, constituant un délit, l'action publique pour la poursuite est limitée à 3 années par l'art. 637 même Code; attendu qu'en décidant autrement, le tribunal de Lesparre a méconnu le véritable sens de la loi pénale, et que son jugement doit être réformé; attendu, en fait, qu'Antoine Hostein était traduit devant le tribunal correctionnel de Lesparre, comme prévenu d'avoir, il y a quatre ans environ, alors qu'il avait moins de 16 ans, commis un attentat à la pudeur, consommé ou tenté sans violence sur une enfant âgée de moins de 13 ans ; - que le ministère public reconnaissait, par son assignation même, que plus de 3 ans s'étaient écoulés entre le jour où l'infraction avait été commise et le premier acte de la poursuite; -- que le fait reproché à ce prévenu était ainsi couvert par la prescription et ne pouvait être retenu par le tribunal; - réforme, etc.

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Du 1er octobre 1869. C. de Bordeaux, ch. corr. M. du Périer, prés. M. Fabre de la Bénodière, avoc. gén.

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1o En défendant à peine de nullité de prendre pour interprète un des témoins, l'art. 322 C. inst. cr. n'a entendu fonder l'incapacité absolue que sur une incompatibilité de fonctions, laquelle n'est pas méconnue si l'interprète n'a été entendu comme témoin ni dans l'instruction ni aux débats, encore bien que son nom figure sur la liste des témoins notifiée.

2o Dans l'intervalle entre l'ordonnance de transmission et le rapport à la chambre d'accusation, s'il est urgent de faire une constatation, telle que · celle des aveux que fait à ce moment l'accusé, le procureur impérial peut en dresser procès-verbal à titre de renseignement.

3° Quoique le dossier transmis à la Cour de cassation contienne une liasse de pièces qui n'ont été ni cotées et parafées ni comprises dans l'inventaire, le défenseur de l'accusé doit être présumé avoir pu en prendre communication, lorsque certaines indications établissent que cette liasse était parvenue au greffe de la Cour impériale avant l'arrêt de la chambre d'accusation.

ARRET (Troppmann).

LA COUR; Sur le premier moyen pris de la violation des articles 317 et 332 C. inst. cr., en ce que le sieur Blind a été designé comme interprète par le président de la Cour d'assises, encore bien qu'il fût porté sur la liste des témoins notifiée à l'accusé; attendu qu'il est vrai qu'aux termes de l'article 332 C. inst. crim., l'interprète ne peut être pris parmi les témoins;

attendu

« EdellinenJatka »