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d'études approfondies dont il s'agissait de profiter. La Sous-Commission n'a pas tardé

placer à ce point de vue. Après avoir examiné rapidement les articles additionnels de 1868, énoncé quelques propositions en vue de les modifier ou de les compléter, la Sous-Commission a constitué un Comité de rédaction composé de l'amiral Fisher, du capitaine de vaisseau Siegel, du capitaine de frégate Schéine et du professeur Renault. Ce Comité a travaillé avec le sincère désir d'aboutir à un résultat acceptable pour tout le monde. Il s'est entendu sur une série de dispositions qui ont été soumises successivement à la Sous-Commission, puis à la Commission. Le Département a été tenu au courant des diverses résolutions prises par le Comité de rédaction et finalement l'amiral Péphau a soumis au Ministère de la Marine l'ensemble du projet. Pour l'explication de ce projet, nous pouvons renvoyer au rapport de M. Renault qui, accepté sans modification par le Comité de rédaction, a été déclaré ètre le commentaire authentique des résolutions adoptées. Quelques observations suffiront à en caractériser l'esprit.

On s'est borné à poser les principes internationaux et on n'est pas entré dans des détails intérieurs d'organisation et de réglementation qu'il appartient à chaque État d'arrêter suivant ses intérêts ou ses habitudes. Tout en étant préoccupé des exigences de l'humanité, on n'a pas oublié les nécessités de la guerre. On a évité des prescriptions qui peuvent être inspirées par des sentiments généreux, mais qui sont exposées à ètre fréquemment méconnues par les belligérants dont elles entravent l'action. On a considéré comme indispensable de n'imposer que des obligations pouvant être exécutées en toute circonstance et de laisser aux combattants la latitude dont ils ont besoin.

Les dispositions arrêtées rentrent dans trois ordres d'idées. Elles règlent la condition:

1o Des bâtiments employés à un service hospitalier (art. 1 à 6);

2o Du personnel charitable (art. 7);

3o Des blessés, malades ou naufragés (art. 8 et 9).

Ces dispositions correspondent aux articles additionnels de 1868 qui sont singulièrement améliorés le fond et pour pour la forme, ainsi le montre le rapport. que Sur la proposition de M. Renault, on a prévu un cas dont il n'était pas question dans les articles de 1868, celui de naufragés, blessés ou malades, débarqués dans un port neutre. Ce cas est de nature à se présenter fréquemment et, en l'absence de réglementation précise, peut donner lieu à des difficultés. On a été d'accord sur la nécessité de prévoir le cas, mais des difficultés ont surgi quant à la manière de le régler.

Dans la séance de la Sous-Commission (13 juin) où a été discuté le projet présenté par le Comité de rédaction, d'insignifiantes modifications furent demandées. Le capitaine Mahan, Délégué des États-Unis, crut trouver une lacune dans le projet et le Comte de Grelle-Rogier, Délégué de Belgique, signala une contradiction qui existait, suivant lui, entre l'article 10 du Projet et l'article 55 du Projet de déclaration des Lois et Conventions de la guerre terrestre.

Expliquons ce dernier point, qui a soulevé une difficulté tout à fait en disproportion avec l'importance du sujet. Le Comité proposait un article 10 ainsi

conçu:

Les naufragés, blessés ou malades, qui sont débarqués dans un port neutre, du consentement

de l'autorité locale, devront être gardés par celle-ci de manière qu'ils ne puissent pas de nouveau prendre part aux opérations de la guerre.

Les frais d'hospitalisation et d'internement seront supportés par l'État dont relèvent les naufragés, blessés ou malades.

Le Comte de Grelle-Rogier proposait, au premier alinéa, un amendement ainsi

conçu :

Les naufragés, blessés ou malades, qui sont débarqués dans un port neutre, du consentement de l'autorité locale, ne pourront être renvoyés qu'à leur pays d'origine et seront, dans ce cas, déclarés incapables de servir pendant toute la durée des opérations de guerre.

la

Le but était de mettre en harmonie les règles de la guerre maritime et celles de guerre continentale. Le Comité ne voulut pas accepter ce point de vue. Il crut que la question ne se présentait nullement dans des conditions identiques dans l'une et dans l'autre, qu'elle devait donc être considérée en elle-mème dans le cas prévu sans aucune préoccupation de ce qui pourrait être décidé pour le cas plus ou moins analogue de blessés ou de malades pénétrant sur un territoire neutre. Certains Délégués craignaient qu'il ne résultât de la règle proposée une trop lourde charge pour les États neutres à raison de l'obligation de conserver pendant toute la durée de la guerre les naufragés, blessés ou malades. Mais il convient de remarquer, d'une part, que le débarquement est toujours subordonné au consentement de l'autorité locale ; d'autre part, que l'État neutre doit être remboursé de ses dépenses. Enfin il ne paraît pas probable que le nombre des naufragés, blessés ou malades, ainsi débarqués, puisse jamais être très considérable. La perspective de l'internement pourra détourner les navires portant les naufragés d'un belligérant de se rendre dans un port

neutre.

Malgré ces raisons, l'opposition subsista et peu s'en fallut qu'elle ne triomphât. C'est à une très faible majorité que l'article du Comité fut maintenu. Il est vrai que dans la majorité étaient, sauf les États-Unis, toutes les Grandes Puissances et dans la minorité la Belgique, le Siam, la Chine, la Suisse. Nos Délégués auraient facilement consenti quelques concessions, mais les Délégués de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne et de la Russie s'étant montrés absolument intransigeants, nos Délégués ne crurent pas devoir rompre T'accord qui avait existé sur tous les points. Il aurait été déplorable que le projet échouât sur une telle question. Grâce aux efforts de M. le Président Asser, l'unanimité fut obtenue pour le texte suivant :

Les naufragés, blessés ou malades, qui sont débarqués dans un port neutre, du consentement de l'autorité locale, devront, à moins d'un arrangement contraire de l'Etat neutre avec les États belligérants, être gardés par l'État neutre de manière qu'ils ne puissent pas de nouveau prendre part aux opérations de la guerre.

On remarquera qu'en réalité la nouvelle rédaction n'apporte au fond aucun changement au texte proposé. Celui-ci n'empêchait nullement les États neutres de faire des arrangements avec les belligérants au sujet de la situation envisagée. Les intéressés ont toujours la faculté de modifier d'un commun accord les règles qui les concernent. Le changement apparent a eu l'avantage de permettre aux opposants de voter le texte sans avoir l'air de se rétracter.

Quoi qu'il en soit, en séance plénière, la Conférence vota sans aucune cbjection les articles présentés par le Comité de rédaction.

Ces dix articles avaient besoin d'être complétés pour revêtir la forme d'une Convention diplomatique. Les hésitations qui s'étaient produites tout d'abord disparurent en présence du résultat des travaux du Comité de rédaction. Tout le monde fut d'avis qu'il était d'un intérêt général que les dispositions arrêtées devinssent obligatoires le plus tôt possible et en vertu d'un Acte final signé dans la Conférence mème. Ce fut la Commission spécialement chargée de la rédaction de l'Acte final qui eut à s'occuper de cet encadrement diplomatique des dispositions techniques. Un préambule très bref les rattacha à la Convention de Genève du 22 août 1864. L'article 11 détermine la portée obligatoire de la Convention conformément au droit commun, déjà formulé dans la Déclaration de Saint-Pétersbourg de 1868; l'article 12 règle la forme de la ratification. La question du droit d'adhésion des Puissances non représentées, qui a été posée d'une manière générale pour les trois Conventions signées à la Haye et qui sera examinée plus loin, a été promptement résolue pour la présente Convention. L'article 13 admet la faculté d'adhésion pour les Puissances non signataires qui auront accepté la Convention de Genève du 22 août 1864. Puisqu'il s'agit d'adapter à la guerre maritime les principes de la Convention de Genève, il a paru logique de commencer par reconnaitre ces principes avant de les étendre à une autre matière. La disposition présentait de l'intérêt, notamment pour la Chine, qui n'a pas encore adhéré à la Convention de Genève et qui, ayant été représentée à la Haye, a pu signer la Convention relative à la guerre maritime.

Enfin l'article 14 prévoit le cas de dénonciation, afin que la Convention ne soit pas brusquement anéantie du jour au lendemain.

Cette Convention peut être considérée comme une œuvre vraiment utile. Elle répond aux désirs du Gouvernement français, et a été acceptée par tous les États représentés à la Haye (1).

DEUXIÈME SOUS-COMMISSION.

REVISION DE LA DÉCLARATION DE BRUXELLES DE 1874.

Nos instructions portaient que, dans les mêmes sentiments que ceux qui avaient été exprimés pour l'adaptation à la guerre maritime de la Convention de Genève, « ła France serait heureuse de s'employer à un nouvel examen et, si possible, à la ratification de la Déclaration de la Conférence de Bruxelles de 1874 ». Nous avons pris part à la discussion dans cet esprit et nous pouvons dire que nous avons contribué au résultat qui a été plus favorable qu'on n'avait pu le penser d'abord. Des difficultés

Quatre Puissances ont, en signant la Convention, fait des réserves sur l'article X, ce sont l'Allemagne, les États-Unis d'Amérique, la Grande-Bretagne et la Turquie.

avaient d'abord surgi de divers côtés et, comme il était aisé de le prévoir d'après les précédents, surtout de la part de la Grande-Bretagne, bien qu'elle n'ait pas été aussi intransigeante qu'en 1874, et aussi des petits États, spécialement de la Belgique et de la Suisse. A certains moments, la résistance a été telle et, il faut bien le dire aussi, la discussion a été si confuse, que le Président, M. de Martens, craignant que tout ne fût compromis, était disposé à ne pas insister sur certains points très importants, parce qu'il désespérait de trouver des formules conciliant tous les intérêts. Le Premier Délégué de France a réussi à empêcher cet avortement partiel; il a mis en relief les points sur lesquels une entente pouvait s'établir et, finalement, un Comité de rédaction présidé par lui a pu arrêter des dispositions acceptables par tout le monde.

Sans méconnaître en rien les mérites de la Conférence de Bruxelles de 1874 et

les services rendus par elle, il est permis d'affirmer que le texte adopté par la Conférence de la Haye est bien supérieur à celui du Projet de 1874 pour le fond et pour la forme. Nous ne nous livrerons pas à un commentaire technique que l'on trouvera dans le rapport consciencieux de M. Édouard Rolin; nous nous attacherons seulement à faire ressortir l'esprit général de la nouvelle rédaction.

On remarquera d'abord que le titre limite nettement la portée d'application de la Convention qui concerne les lois et coutumes de la guerre sur terre. Nous avons été constamment préoccupés de laisser en dehors tout ce qui concernait la guerre maritime, d'empêcher qu'on ne pût se prévaloir pour celle-ci des règles admises pour la guerre continentale; nous aurons à revenir sur ce point fort important. Même là où on a conservé pour le fond les dispositions de 1874, la rédaction en a été améliorée, ce qui était facile après les études critiques publiées pendant vingt-cinq ans. Enfin les matières ont été classées, suivant un ordre très méthodique, en quatre Sections:

I. Des belligérants;

II. Des hostilités ;

III. De l'autorité militaire sur le territoire de l'État ennemi;

IV. Des belligérants internés et des blessés soignés chez les neutres.

Un préambule assez long, après avoir rattaché la matière de la Convention au programme général de la Conférence qui était de rendre les guerres à la fois plus rares et plus humaines et rappelé le souvenir de la Conférence de 1874, indique en termes élevés l'esprit dans lequel les dispositions ont été édictées. Le désir est de diminuer les maux de la guerre autant que les nécessités le permettent, en posant des règles générales de conduite aux belligérants, dans leurs rapports entre eux et avec les populations. On n'a pas pu prévoir toutes les circonstances qui se présentent dans la pratique; il est constaté que, pour les cas non prévus, les populations et les belligérants restent sous la sauvegarde et sous l'empire des principes du droit des gens, tels qu'ils résultent des usages établis entre nations civilisées, des lois de l'humanité et des exigences de la conscience publique. Les Hautes Parties contractantes, décla–

rent que c'est dans ce sens que doivent s'entendre notamment les articles 1 et 2 du Règlement adopté. Il s'agit des articles qui déterminent les conditions auxquelles la qualité de belligérant sera reconnue à ceux qui prennent part à la lutte. Avec l'organisation militaire actuelle de la plupart des pays, spécialement de la France, il est difficile de supposer que des individus puissent participer d'une façon utile à la lutte en dehors des conditions prévues. Cependant on s'est refusé à dire que ceux qui lutteraient en dehors de ces conditions devraient être considérés comme des brigands et des criminels.

C'est ce qu'exprimait une proposition de Sir John Ardagh ainsi conçue : « Rien dans ce chapitre ne doit être considéré comme tendant à amoindrir ou à supprimer le droit qui appartient à la population d'un pays envahi de remplir son devoir d'opposer aux envahisseurs, par tous les moyens licites, la résistance patriotique la plus énergique. M. Léon Bourgeois a constaté que la Sous-Commission était d'accord avec Sir John Ardagh pour le fond, que rien ne devait diminuer les garanties que le droit des gens donne aux populations quand elles résistent à l'envahisseur. Il s'agissait seulement de savoir sous quelle forme la pensée serait insérée dans le texte, si l'on ne se contenterait pas de la déclaration faite par le Président M. de Martens. Finalement Sir John Ardagh, dans un but de conciliation, retira l'article proposé par lui, le principe qu'il développait ayant recueilli l'approbation unanime. En somme, on n'acceptait aucune disposition de nature à entraver les efforts légitimes du patriotisme et dans ces conditions on n'avait plus à redouter des résistances analogues à celles qui se sont produites en 1874. Le Premier Délégué de Belgique, M. Beernaert, qui s'est montré le défenseur le plus énergique des droits des populations envahies, n'a pas, en effet, maintenu l'opposition qu'il avait d'abord manifestée.

Une autre question de principe très grave s'est posée en ce qui concerne les rapports de l'envahisseur ou de l'occupant avec les fonctionnaires ou la population du pays envahi. Il fallait éviter de légitimer l'usage de la force et de transformer en souveraineté de droit le pouvoir de fait du vainqueur. Il fallait également éviter de reconnaitre un droit de l'occupant et donner néanmoins à la population du pays envahi les garanties compatibles avec les nécessités militaires. On peut bien dire que la force ne donne pas de droit, qu'il y a simplement des faits de violence que le vaincu est contraint de subir; on ne peut pas empêcher la situation d'exister et de produire ses conséquences naturelles. Faut-il essayer de déterminer ces conséquences ou laisser le vainqueur agir à sa guise, suivant les règlements qu'il lui plaira d'édicter pour ses troupes? Voilà la véritable question. Le vaincu trouvera-t-il une compensation à cet arbitraire dans la circonstance que le vainqueur ne pourra produire une document signé du Gouvernement légal du pays envahi et réglant la situation de l'envahisseur ! C'est douteux. Les règles écrites ne sont pas toujours respectées, mais il y a plus de chance pour l'observation de règles conventionnelles que pour le respect de règlements qu'il est loisible de changer à volonté. Voilà dans quel esprit la Conférence s'est prononcée après de longues discussions en Commission et en Comité de rédaction. On a examiné de très près tous les articles de 1874 et on a supprimé ou modifié tous ceux qui ne rentraient pas dans cet ordre d'idées et qui reconnaissaient ou semblaient reconnaître un véritable droit à l'envahisseur.

Enfin, quant à la forme de l'acte dans son ensemble, une grande amélioration a

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