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N° 224.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Paris, le 22 juillet 1870.

Mylord, j'ai eu l'honneur de recevoir hier, à onze heures du soir, le télégramme de Votre Seigneurie, de huit heures du soir, me donnant ordre de m'assurer si les priviléges accordés par le Gouvernement français aux bâtiments de l'ennemi avec chargements pour les ports français et pour le compte de Français peuvent être considérés comme acquis aux bâtiments ennemis avec cargaison pour les ports anglais, pour compte anglais.

Ce matin, j'ai envoyé M. West, secrétaire d'ambassade de Sa Majesté, chez M. Desprez, directeur politique au ministère des Affaires étrangères, dans l'espoir que, de cette manière, j'aurais immédiatement une réponse favorable, que je serais en état de communiquer tout de suite à Votre Seigneurie par télégramme.

Toutefois, M. Desprez a référé à M. West à une circulaire qui, a-t-il dit, a été envoyée aux représentants de la France à l'étranger, pour être communiquée aux Gouvernements auprès desquels ils sont accrédités, et a simplement renouvelé l'assurance que la France agirait conformément à la Déclaration de 1856.

Aussitôt après avoir reçu cette réponse, j'écrivis une note officielle à M. de Gramont, que je portai moi-même au ministère. J'appris qu'il assistait au Conseil des ministres aux Tuileries, il ne me restait plus alors qu'à laisser ma note avec un message.

Le soir j'eus une entrevue avec M. de Gramont. Il me dit qu'une réponse à ma note avait été préparée au ministère, et il se mit à me la lire. Cette note disait que ma question avait reçu à l'avance une réponse négative dans une circulaire qui avait été envoyée au marquis de La Valette, pour être communiquée par lui au Gouvernement de Sa Majesté, et que les chargements trouvés à bord des bâtiments capturés seraient rendus sur la preuve qu'ils étaient de propriété britannique.

Je fis remarquer que cette dernière observation était complétement hors question. La France était tenue par la Déclaration de 1856, de ne pas saisir des propriétés neutres sous pavillon ennemi, et qu'en conséquence il n'y avait pas lieu à discussion. La question réellement à agiter était celle-ci : Etait-il juste ou amical que le Gouvernement français, pour sa propre convenance, et par égard pour les intérêts de ses propres sujets, accordât certains priviléges aux bâtiments enne

mis ayant des chargements français à bord, et de refuser ces mêmes priviléges à ceux des bâtiments dont les chargements appartenaient à des neutres. Il pouvait, ajoutai-je, se trouver quelques circonstances particulières dans ce cas, mais je pensais que M. de Gramont pouvait difficilement admettre, comme principe général, que la France pût équitablement exclure les neutres de faire usage des bâtiments ennemis ce qu'elle permettait pour ses propres sujets. M. de Gramont ne pourrait sûrement s'attendre à ce que les neutres considèrent comme juste que la France prenne avantage de ses droits de belligérant pour s'assurer exclusivement des avantages commerciaux à leur détriment; par exemple, qu'elle autorisât des bâtiments allemands à entrer ou à sortir des ports français sans être inquiétés, tandis qu'il saisirait tous ceux qui feraient commerce avec des ports neutres.

Une longue conversation s'en suivit, durant laquelle M. de Gramont manifesta le vif désir de prendre en considération les intérêts des neutres en général et ceux de la Grande-Bretagne en particulier. Il m'a fait observer que si l'arrangement auquel je faisais des objections était un de ceux actuellement adoptés au commencement des guerres, aucune plainte ne pouvait être soulevé justement contre la France pour sa remise en vigueur. Si cependant, s'il était une nouveauté, ou bien s'il admettait une exception, il serait certainement disposé à donner à l'Angleterre l'entier bénéfice d'une concession qui pourrait être faite en toute sûreté.

Il termina en me disant qu'en tous cas il examinerait de nouveau la question avant de m'envoyer sa réponse à ma note.

Je lui rappelai la grande importance qu'il y a pour les sujets anglais engagés dans le commerce, à être renseignés sans retard à ce sujet.

J'ai déjà communiqué la substance de cette dépêche à Votre Seigneurie, et j'ai l'honneur de vous adresser aujourd'hui copie de ma note à M. de Gramont.

J'ai, etc.

Signé LYONS.

ANNEXE.

LORD LYONS AU DUC DE GRAMONT.

Paris, le 22 juillet 1870.

Monsieur le ministre, une note a paru dans la partie officielle du Journal officiel, pour annoncer les intentions du Gouvernement français à l'égard des bâtiments marchands.

La note, d'après sa teneur textuelle, ne semblerait s'appliquer qu'aux bâtiments de l'ennemi avec chargements pour les ports français pour le compte de Français. Le gouvernement de Sa Majesté suppose que cette note entend accorder les mêmes priviléges aux chargements à bord de bâtiments ennemis pour des ports anglais pour le compte d'anglais.

La question est d'une telle importance pour les intérêts commerciaux de la Grande-Bretagne, que le Gouvernement de Sa Majesté prie instamment le Gouvernement de l'Empereur de lui donner une réponse catégorique à cet égard sans le moindre retard.

Je vous serais très-obligé si vous pouviez envoyer tout aussitôt au Gouvernement de Sa Majesté le renseignement qu'il est si désireux de recevoir.

J'ai, etc.

N° 225.

Signé LYONS.

LORD A. LOFTUS AU COMTE DE GRANVILLE.

Berlin, le 22 juillet 1870.

Mylord, je n'ai pas manqué, d'après vos instructions, d'informer le baron de Thile qu'il n'y avait pas le moindre fondement de vérité dans le rapport adressé du Wurtemberg au Gouvernement français que Votre Seigneurie aurait dit : que la France attaquerait la Prusse par terre et par mer, sans déclaration préalable, aussitôt qu'elle aurait reçu une réponse négative.

J'ai, etc.

Signé : LOFTUS.

N° 226.

LE PRÉSIDENT DU CONSEIL FÉDÉRAL SUISSE AU COMTE DE GRANVILLE.

Berne, le 22 juillet 1870.

Par sa note circulaire du 2 mai dernier, le Conseil fédéral a eu l'honneur d'informer le Gouvernement royal qu'à l'exception de

l'Espagne et de Rome, tous les États signataires de la Convention de Genève, du 22 août 1864, pour les secours aux militaires blessés, ont adhéré aux articles additionnels adoptés à Genève, le 20 octobre 1868, modifiés plus tard à la demande de la France (art. 9), et interprétés par la France et l'Angleterre (art. 10), mais que la Russie, tout en adoptant ces articles additionnels, propose une adjonction à l'art. 14 dans le but de prévenir l'abus du drapeau distinctif de la neutralité. Quoique plusieurs Gouvernements aient déjà fait parve nir au Conseil fédéral leur réponse à la circulaire susindiquée, on ne saurait s'attendre à recevoir prochainement les déclarations de tous les États contractants, et l'adoption définitive des articles additionnels ne pourra, par conséquent, avoir lieu que dans un temps plus ou moins éloigné.

Or, la situation politi que actuelle est si grave qu'elle a imposé au Conseil fédéral le devoir d'user de toute son influence, comme organe intermédiaire entre les États contractants, pour que les bienfaits de la Convention de Genève et des articles additionnels puissent avoir leur plein effet pendant la guerre qui vient d'éclater. Afin d'atteindre ce but, il s'est adressé aux Gouvernements de la Confédération de l'Allemagne du Nord et de la France, en leur proposant et leur recommandant de reconnaître dès à présent la Convention de Genève, avec ses articles additionnels modifiés à la demande de la France et interprétés par la France et la Grande-Bretagne, comme devant être observée dans toutes ses parties pendant la guerre, au moins à titre de modus vivendi.

Aujourd'hui, le Conseil fédéral a la satisfaction de pouvoir annoncer aux hauts Gouvernements des États signataires de la Convention de Genève, que les cabinets de Berlin et de Paris ont accédé avec empressement à cette proposition, et qu'ils ont déjà donné les directions nécessaires aux officiers commandant leurs corps d'armée.

Le Conseil fédéral est heureux d'avoir pu, par sa démarche auprès de la Confédération de l'Allemagne du Nord et de la France, assurer la réalisation immédiate de cette œuvre humanitaire; et en faisant les vœux les plus ardents pour qu'elle contribue efficacement à adoucir les maux de la guerre, il prie, etc.

Au nom de Conseil fédéral Suisse,

Le Président de la Confédération,
Signé DUBS.

Le Chancelier de la Confédération,
Signé SCHIESS.

N° 227.

PROCLAMATION ADRESSÉE PAR L'EMPEREUR A L'ESCADRE DU NORD
ET LUE PAR L'IMPERATRICE.

Cherbourg, le 23 juillet 1870.

Officiers et marins, quoique je ne sois pas au milieu de vous, ma pensée vous suivra sur ces mers où votre valeur va se déployer.

La marine française a de glorieux souvenirs; elle se montrera digne de son passé.

Lorsque, loin du sol de la patrie, vous vous trouverez en face de l'ennemi, songez que la France est avec vous, que son cœur bat avec le vôtre et qu'elle appelle sur vos armes la protection du ciel.

Pendant que vous combattrez sur mer, vos frères de l'armée de terre lutteront avec la même ardeur pour la même cause que vous. Secondez réciproquement vos efforts, que couronnera le même succès.

Allez, montrez avec orgueil nos couleurs nationales. En voyant le drapeau tricolore flotter sur nos vaisseaux, l'ennemi saura que partout il porte dans ses plis l'honneur et le génie de la France.

Palais de Saint-Cloud, le 23 juillet 1870.

NAPOLÉON.

N° 228.

NOTE DU JOURNAL OFFICIEL.

Paris, le 23 juillet 1870.

Au mois d'octobre 1868, une conférence internationale réunie à Genève avait été chargée de préparer un projet d'articles additionnels à la Convention du 22 août 1864, pour l'amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne; ces articles, qui avaient particulièrement pour objet d'étendre à la marine les dispositions de la Convention de 1864, n'avaient point encore reçu la consécration diplomatique.

Le Conseil fédéral suisse a exprimé au Gouvernement de l'Empereur l'espoir qu'il voudrait bien reconnaître néanmoins ces nouvelles

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