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chiffre de l'exercice écoulé excède de 971 le chiffre moyen des dix dernières années, il demeure beaucoup au-dessous du chiffre moyen des périodes précédentes (1881 à 1895), pendant lesquelles l'émigration a été considérable. Nous ferons observer toutefois que parmi les 4.707 personnes qui émigrèrent en 1902, il s'en trouvait un certain nombre qui avaient déjà émigré autrefois et qui, après un séjour plus ou moins long en Suisse, retournaient dans leur nouvelle patrie; d'autre part, nous savons que bien des personnes ont émigré de Suisse dans les pays d'outremer sans passer par une agence ou sans avoir été portées sur les listes que les agences doivent remettre chaque mois au bureau de l'émigration.

Ce sont principalement les cantons suivants qui accusent une augmentation du chiffre des émigrants en 1902: Zurich, Berne, Uri, Schwyz, Bâle-ville, Schaffhouse, Argovie, Tessin et Neuchâtel; les cantons de Genève et d'Unterwald accusent au contraire une importante diminution. Parmi les émigrants de l'année 1902, qui représentent 1.42 0/00 (contre 1,18 0/00 en 1901) de la population totale de la Suisse (3,315,443) 2.953 (ou 62,74 0/0) étaient originaires du canton qu'ils ont quitté, 664 (ou 14,10 0/0) étaient originaires d'autres cantons et 1.090 (ou 23,16 0/0) étaient des étrangers résidant en Suisse.

En outre, les agences suisses ont expédié en 1902 environ 16,500 personnes qui leur étaient adressés par des agences étrangères, ou qui, au moment de la conclusion du contrat, n'avaient pas leur domicile en Suisse, ou qui ne peuvent être considérées comme des émigrants. L'augmentation, depuis quelques années, des expéditions en transit tient d'une part à ce que les principales compagnies de navigation sont représentées en Suisse, et d'autre part, comme nous l'avons remarqué déjà dans notre rapport précédent, à la situation favorable des places suisses d'où se fait l'expédition pour les ports du nord de l'Europe sur l'Atlantique. Bien des mesures ont été prises en 1902 pour faciliter et améliorer l'expédition des émigrants; sur certaines lignes de chemin de fer, il existe des tarifs réduits pour émigrants.

C'est au Havre que la plupart des émigrants ont été embarqués (2.226). Viennent ensuite Anvers (691), Southampton (681). Brême (468). Gênes (155), Marseille (134), Boulogne-sur-mer (126). Les émigrants suisses ont payé aux agences pour leur expédition fr. 1.218.806,44. Un certain nombre d'émigrants ont reçu leurs billets du pays d'outre-mer (prepaids). Les lettres de change achetées par les émigrants représentent une somme de fr. 345,262.63. Si l'on considère que les 644 personnes qui émigrèrent du Tessin n'étaient pas dénuées de toute ressource, mais avaient, comme bien d'autres, acheté leurs lettres de change dans des banques, el que beaucoup de ces émigrants n'étaient pas encore en âge de gagner leur vie, on jugera que les adultes sont partis avec des sommes considérables. Le tableau ci-dessus montre encore que l'émigration suisse ne se recrute pas dans la population pauvre; on a constaté au contraire, dans certaines contrées de notre pays, que bien des personnes émigreraient si elles en avaient les-moyens.

De la somme indiquée plus haut, fr. 333.825,63 étaient payables à New-York, fr. 10.567 dans d'autres Etats de l'Union, fr. 200 au Brésil et fr. 670 dans l'Argentine. Parmi les lettres de change, il y en avait 12 de 3.000 à 5.000 francs, 6 de 5.000 à 10.000 francs et 3 de 10.000 à 20.000 francs.

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Depuis que l'on possède des données sur la profession des émigrants, l'on constate que la plupart d'entre eux se recrutent parmi les agriculteurs, peu parmi les artisans ou les commerçants.

AGENTS, SOUS-AGENTS ET CAUTIONNEMENTS

En 1902, il a été délivré 2 patentes, savoir à MM. Jean et Guillaume Félix à Chiasso, et à MM. Salvatore Jauch et Nicola Pellegrini à Giubiasco et à Chiasso. On expédie des émigrants: 15 agences ayant leur siège à Bâle, Bienne, Genève, Lucerne, Zurich et en divers endroits du canton de Tessin, et 3 bureaux de passage. Ces derniers ont expédié moins des émigrants, dans le sens de la loi fédérale du 22 mars 1888, que des personnes ayant séjourné en Suisse quelque temps ou qui ne se rendaient que temporairement dans un pays d'outre-mer (touristes, industriels, négociants, explorateurs, malades, personnel d'hôtel).

Les agences d'émigration, dont le nombre, depuis que la loi existe, n'a jamais été aussi grand qu'aujourd'hui, d'où l'on peut conclure que ce sont des entreprises très lucratives, avaient à leur service, au commencement de 1902, 184 sous-agents; dans le courant de l'année, 39 ont démissionné, 40 ont été nommés. On en trouve surtout dans les cantons du Tessin (32), de Berne (29) des Grisons (16), de Vaud (14), de Zurich (13), de St-Gall (12), de Bâle-ville (11); il n'y a ni agents ni sous-agents dans les cantons d'Unterwald-le-bas, de Zoug, de Fribourg, de Soleure et de Bâle-campagne.

De nombreuses mutations ont eu lieu dans l'effectif du cautionnement. La somme des cautionnements déposés par les agents s'élevait, au commencement de l'exercice, à fr. 1.290.180; fr. 268.750 ont été encaissés, fr. 173.000 ont été retirés par suite de tirages, de dénonciation et de conversion d'emprunt, de sorte qu'à la fin de l'exercice, il y avait en dépôt fr. 1.385.930.

Nous nous sommes étendus déjà dans de précédents rapports sur la manière dont se font les affaires d'émigration et sur les inconvénients qu'entraînent les fréquentes mutations dans l'état des sous-agents. Les constatations faites en 1902 ne diffèrent pas de celles qu'on a faites précédemment ; nous nous bornons donc sur ce point à renvoyer à ce que nous avons dit autrefois.

Les désordres causés à la gare centrale de Bâle par des employés d'agences se renouvelant, au grand désagrément des voyageurs, l'autorité de police du canton de Bâle-ville nous a demandé de prendre une disposition interdisant aux agents de s'arracher réciproquement les émigrants. Après avoir examiné la question et entendu la direction du II° arrondissement des chemins de fer fédéraux, nous sommes arrivés à cette conclusion que la loi fédérale du 22 mars 1888 ne contient aucune disposition permettant à l'autorité fédérale d'interdire aux agents, sous peine d'amende, d'importuner les émigrants; que c'était plutôt l'affaire des autorités de police cantonales et locales de remédier à ce désordre. En 1899, l'administration du chemin de fer s'était vue forcée de défendre aux employés des agences de pénétrer dans la gare. Plus tard, cette administration nous informait que les scènes scandaleuses qui s'étaient passées à la gare se passaient. maintenant sur la place de la gare, qui n'appartient pas au chemin de fer et où l'administration, par conséquent, n'a aucun droit d'exercer la police. Se fondant sur le code de police pénale, le Département de police du canton de Bâle-ville édicta les prescriptions suivantes :

1o Il est permis aux agences d'émigration de placer un ou deux employés tout au plus à la gare centrale de Bâle pour y recevoir les immigrants et les émigrants.

2o Ces employés se placeront, à la sortie, à la place que leur assignera la direction du chemin de fer; ils ne pourront s'en éloigner en aucun

cas.

30 Il leur est sévèrement interdit de raccoler d'une manière pressante les arrivants, par exemple en les appelant à haute voix, en portant la main sur eux, etc.., en un mot de les importuner d'une manière quelconque. En outre, ils veilleront à ce qu'émigrants et immigrants ne forment pas de rassemblements à la sortie et ne gênent pas la circulation.

4o Les clients des diverses agences d'émigration une fois triés, les employés de ces agences les emmèneront sans délai hors de la gare.

5° Les employés des agences d'émigration obéiront immédiatement et sans réplique aux organes du chemin de fer et de la police.

On s'est demandé souvent ce que doivent faire les agents lorsqu'un chef de famille qui émigre refuse de s'assurer contre les accidents pour la durée du voyage, comme le prescrit l'article 15, no 6, ou lorsqu'un émigrant refuse d'assurer son bagage (article 15, no 5) et de payer la prime de cette assurance. Comme la disposition légale dont il s'agit n'admet pas d'exception, l'agent ne peut que renoncer à conclure le contrat ou supporter lui-même la prime.

PLAINTES

Les plaintes pour contraventions à la loi sur l'émigration commises par des agents, des sous-agents ou des tiers, et les contestations concernant des affaires d'émigration n'ont pas manqué non plus en 1902. Les plainles ont même été plus nombreuses que l'année précédente et beaucoup ont exigé de longues enquêtes. Une grande partie toutefois des conteslations est résultée de la rigueur avec laquelle depuis quelque temps les lois des Etats-Unis sur l'immigration sont appliquées à New-York. Chaque année reviennent aussi les réclamations d'agents contre d'autres agents pour concurrence déloyale, réclame illicite, emploi aux affaires d'émigration de personnes non autorisées, publications, notamment en contradiction avec les instructions données aux agents en vertu de la loi, etc. Il n'a pas toujours été possible de reconnaître le bien-fondé de ces accusations; plus sérieuses sont les plaintes pour expédition d'émigrants en violation du contrat, en particulier pour expédition par d'autres moyens de transport que ceux prévus au contrat. En revanche, un fait réjouissant, c'est l'absence de plaintes, ces derniers temps, sur la manière dont les émigrants sont traités sur les chemins de fer et les navires, et cependant il a été expédié en 1902, d'après la statistique, plus de 21.000 émigrants, dont le plus grand nombre a passé par Bâle, Porentruy, etc., et plusieurs centaines de personnes souvent ont pris à Bàle, le même jour, les trains pour émigrants.

La plupart des agents, il faut le reconnaître, tàchent de se conformer aux exigences de la loi et s'abstiennent, notamment, de toute propagande illicite en faveur de l'émigration. En outre, il ne faut pas l'oublier, les affaires d'émigration sont très compliquées, les personnes expédiées voyagent à travers des pays dont elles ne connaissent pas la langue, et beaucoup n'ont pas l'habitude de voyager; il est donc bien difficile que ce genre d'affaires ne donne jamais lieu à des contestations.

Nous mentionnons ci-après quelques-unes de plaintes et demandes d'intervention qui nous sont parvenues.

1. En avril et mai 1901, plusieurs journaux italiens et suisses relatèrent d'une manière détaillée l'expédition d'émigrants italiens au Canada. Ils accusaient l'agence F. L., à Chiasso, de les avoir poussés à émigrer dans ce pays, peu fait pour les émigrants italiens, en leur assurant qu'ils y trouveraient une occupation lucrative; suivant eux, l'agence se serail servie de tiers, de deux Suisses, entre autres, établis à Montréal, qui auraient promis à ces émigrants, du travail au Canada. Enfin des prospectus. et des brochures dépeignant le Canada sous les plus brillantes couleurs auraient été répandues dans le public.

D'ordre de son gouvernement, la légation d'Italie à Berne s'informa si on avail ouvert une enquête contre l'agence d'émigration F. L. pour contravention à la loi suisse sur l'émigration. Après examen des actes de l'enquête instruite par le gouvernement tessinois, nous avons pris la décision suivante :

1° En ce qui concerne les frères Schenker (Donor Immigration Company) à Montréal et les agents italiens qui ont adressé à l'agence F. L. à Chassio, des émigrants pour les expédier au Canada, les accusations dirigées contre eux par les journaux italiens échappent à la juridiction de l'autorité fédérale.

2° L'unique question qu'ait à examiner cette autorité est de savoir si en expédiant des émigrants italiens au Canada, les agences suisses ont violé ou non des dispositions de la loi sur l'émigration.

3o Ni dans les journaux dont il s'agil, ni dans les communications de la légation d'Italie à Berne, on ne trouve la preuve que l'agence F. L. à Chiasso ait promis aux émigrants qu'elle expédiait au Canada, qu'ils y trouveraient un entretien assuré.

4o Il résulte des actes, au contraire, que ce sont des agents italiens en rapport d'affaires avec l'agence F. L. qui ont promis du travail aux émigrants et qui ont fait de la propagande en faveur de l'émigration au Canada, au lieu que l'agence F. L. s'est exprimée avec la plus grande réserve sur le travail qu'on avait chance d'y trouver.

Au reste, il ressort des dépositions des émigrants italiens que, s'ils se sont décidés à émigrer, c'est qu'ils ne trouvaient pas d'occupation dans leur propre pays.

5° Si, d'après les correspondances susmentionnées, les extraits de copies de lettres de l'agence F. L., produits par les autorités lessinoises, le procès-verbal concernant l'audition d'un certain nombre de personnes qui connaissent bien l'affaire et en particulier une lettre de la compagnie anglaise de navigation Beaver Line, il semble bien probable que l'agence F. L. soit en rapport d'affaires avec la Donor Immigration Company, qui, grâce à ses anciennes relations avec les agents d'émigration italiens, fait de Montréal la plus active propagande, il n'en est pas moins vrai que personne n'a apporté la preuve absolue que l'agence F. L. adresse des émigrants italiens à cette compagnie ou opère en commun avec clle. Au reste même si c'était prouvé, aucune disposition de la loi suisse sur l'émigration ne serait applicable en l'espèce.

6° On a examiné s'il n'y avait pas eu ici participation illicite à une entreprise de colonisation (article 10 de la loi fédérale du 22 mars 1888), mais on est arrivé à un résultat négatif. Et de fait, il n'a été question avec les Italiens émigrés au Canada, ni de la colonisation d'une certaine con

trée, ni d'obligations particulières qu'ils devraient contracter, ni de ce qu'accorderait en retour l'entreprise de colonisation. Ils sont partis en libres émigrants et ont payé eux-mêmes leurs frais de voyage. Personne, au Canada, ne pouvait les obliger à s'établir sur tel ou tel terrain ou à se livrer à un travail déterminé.

7° Enfin, à propos de la situation où sont tombés les émigrants expédiés au Canada, on a examiné encore s'il n'y avait pas eu violation de la disposition de l'article 11, no 3, de la loi précitée, suivant laquelle il est interdit aux agents d'expédier des personnes qui, après avoir payé le prix de leur voyage, arriveraient dénuées de ressources au lieu de destination. Mais personne n'a prétendu qu'à leur arrivée au Canada, les émigrants eussent été dénués de ressources; ce n'est, au contraire, qu'après avoir longtemps cherché en vain du travail qu'ils auraient fait appel à la charité de quelques habitants de Montréal. Enfin, l'on n'a pas nommé les émigrants qui seraient arrivés au Canada sans ressources, el l'agence, si on lui infligeait une amende, aurait le droit d'exiger qu'on lui nommat les personnes expédiées par elle au Canada qui y seraient arrivées dans le dé

nuement.

8° Personne n'ayant prétendu et encore moins prouvé, et l'enquête n'ayant pas établi que ces émigrants italiens eussent été expédiés au Canada en violation d'une disposition de la loi suisse sur l'émigration, il faut laisser aux intéressées, qui affirment avoir été lésés par les promesses trompeuses de l'agence F. L., le soin de porter devant les tribunaux tessinois une réclamation en dommages-intérêts.

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Après avoir donné à la légation d'Italie connaissance de ce qui précède, nous ajoutions que nous étudierions les mesures propres à prévenir de reils incidents, en tant qu'ils ont lieu sur territoire suisse. L'agence incriminée fut invitée à s'abstenir de toute propagande directe ou indirecte en faveur de l'émigration d'Italiens, sous peine de se voir retirer sa patente.

II. Une agence fut accusée d'avoir expédié à New-York un ressortissant de Sainte-Croix que l'autorité américaine ne laissa pas débarquer et réexpédia en Europe, les médecins qui l'examinèrent l'ayant déclaré atteint de scrofulose, de déviation de la colonne vertébrale et de vice du cœur.

Nous avons infligé une amende à l'agence pour les raisons suivantes : 1° Suivant l'article 11, no 4, de la loi fédérale du 22 mars 1888, il est interdit aux agents d'expédier des personnes que les lois du pays de destination défendent de recevoir comme immigrants.

2o D'après le chapitre 1er de la loi des Etats-Unis d'Amérique du 4 mars 1891 (F. féd. 1891, vol. IV, 283), l'entrée aux Etats-Unis est interdite aux personnes atteintes d'une maladie rebutante el contagieuse ou à celles dont il est à prévoir qu'elles tomberont à la charge de la bienfaisance publique, el, suivant le chapitre 1er de la loi du 3 mars 1893 (F. féd. 1893, II, 9o1), le questionnaire devant accompagner tout émigrant qui se rend aux Etats-Unis doit indiquer s'il est physiquement et intellectuellement sain, s'il est difforme ou estropié.

3o Suivant les déclarations concordantes des autorités de notre canton d'origine et de l'autorité d'immigration de New-York, Ch. P. n'est pas atteint sans doute d'une maladie rébutante ou contagieuse, mais d'infirmités toutefois qui pouvaient faire craindre à l'autorité américaine qu'il ne tombât à la charge de l'assistance publique.

4o Le fait que Ch. P. possédait 100 francs et qu'il a en Amérique des parents qui, au besoin, auraient subvenu à son entretien, ne saurait être

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